
DONG DONG DONG DONG ! Les cloches des églises sonnaient fréquemment dans la journée autrefois avec entre autres les matines, les vêpres et les complies, ou encore l’angélus. Elles appelaient à prier mais surtout elles donnaient l’heure aux villageois. Le dimanche, la volée leur rappelait qu’il fallait aller à la messe. Les cloches annonçaient aussi les mariages, les baptêmes ou encore les funérailles par le glas. Plus exceptionnellement, elles prévenaient d’un danger avec le tocsin. Les cloches étaient donc une musique utile, qui informait, rythmait la vie des habitants des villes et des campagnes, tout en étant un symbole fort et permanent de l’Église catholique.

Les recherches généalogiques dans les actes religieux nous ont mené ou nous mèneront immanquablement au baptême d’une cloche. C’est en tout cas vrai pour moi. En épluchant la paroisse de Pierrefitte (Deux-Sèvres) située à mi-chemin de Bressuire et de Thouars en quête de renseignements sur mon ancêtre François Biardeau, j’ai découvert un acte mentionnant la bénédiction de la chapelle Sainte-Marguerite-de-Bournizeaux et de sa cloche les 12 et 13 mai 1721 (AD79 BMS Pierrefitte 1719-1742, vues 10 et 11). Cette trouvaille, inutile en soi pour ma généalogie, m’a pourtant intéressé car elle permet de mieux comprendre le cadre historique où vivaient mes aïeux poitevins.
En effet dans cet acte, j’ai eu la confirmation que le protestantisme s’était implanté dans toutes les régions du Poitou, le Mellois et le Niortais où il s’est maintenu, mais aussi plus au nord, le Thouarsais et le Bocage. En effet, le texte dit qu’il a fallu rebâtir et restaurer la chapelle car elle « …avait été profanée, ruinée et possédée par des religionnaires dès le commencement de l’hérésie de Calvin ». Pour combattre cette hérésie, on a fait appel à un prêtre irlandais, venu épauler le clergé local mis à mal par la nouvelle religion. Celui qui bénit cette chapelle s’appelle Thomas Gould (1657-1734). Il est « …prêtre bachelier en théologie, conseiller du roi, prêtre commendataire de l’abbaye royale de Saint-Laon de Thouars, trésorier de la sainte chapelle de la dite ville, grand doyen de l’église de Cork en Irlande, missionnaire du Roi pour la conversion des protestants et pour l’instruction des nouveaux convertis de la province du Poitou ». Des prêtres irlandais, j’en retrouve 2 autres, Patrice McSwiney et Jean O’Connoran, non loin de là mais bien plus tard, dans les registres de Saint-Sauveur-de-Givre-en-Mai. Le 1er est même témoin au mariage de mes ancêtres Jean Bontemps et Marie-Hélène Grelier, le 3 novembre 1772. Peut-être tous ces religieux sont-ils passés par le collège irlandais qui exista à Poitiers de 1674 à 1762 ?
Cette cloche de la chapelle est bénie et, comme un nouveau-né, elle a un parrain et une marraine. Il semble que leurs noms y soient gravés, « …conformément à l’inscription qui est autour de la cloche ». On a choisi pour cela le fils et la sœur de Henry Berthre de Bournizeaux, le seigneur local qui a mené et financé le projet. Il est vrai que cette chapelle est sur son domaine et qu’elle servira plus au châtelain qu’aux villageois. Le clergé catholique et la noblesse vont de pair. L’acte est comme souvent un exercice de flatterie : les titres à rallonge et possessions multiples, les formules de politesse (illustrissime et révérendissime) sont déclinés à l’envi. Au début du texte, je me demande pourquoi le prêtre parle de « …la dite chapelle que nous avons trouvé propre et magnifique ». J’ai l’explication tout à la fin de l’acte. L’évêque Étienne de La Rochelle veut bien que la chapelle, la cloche, les ornements, les linges soient bénis « …pourvu qu’ils soient propres et le tout dans un état convenable ». Il valait donc mieux, sans doute, le préciser.
Le travail était-il si bien fait que ça ? La cloche a-t-elle due être changée ? Ou bien est-ce parce qu’elle n’avait pas de prénom ? Dix-huit ans plus tard, le 20 août 1739, une cloche est à nouveau bénie dans cette même chapelle de Pierrefitte (AD79 BMS Pierrefitte 1719-1742, vues 72 et 73). Elle est baptisée « Henriette » par les parrain et marraine, enfants du même Henry Berthre de Bournizeaux. Le protestantisme a presque disparu de la région et il n’y a plus besoin de prêtre irlandais pour affirmer la foi catholique. Le clergé local suffit et il est venu en nombre à la bénédiction pour entendre sonner la cloche de la chapelle. DONG DONG DONG DONG !
P.S. 1 : Le château de Bournizeaux existe toujours, il a même encore fière allure car il est restauré, entretenu et occupé. J’ignore malheureusement si la chapelle (avec sa cloche) existe encore et fait partie de ce bâtiment.

P.S. 2 : Il existe une thèse faite par un étudiant irlandais en 2011 sur le prêtre Thomas Gould, mais elle est, malheureusement pour moi, en anglais. Si quelqu’un peut trouver un truc pour la traduire, je suis preneur !
Je confirme, à force de fouiner dans les registres, je suis moi aussi tombée sur des baptêmes de cloches (dans des circonstances dénuées de tout protestantisme en revanche). Aucune précision sur la propreté, par contre le curé indiquait gentiment le poids et la taille du « bébé » ;-).
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C’est une autre chose que j’adore quand je reviens au pays: entendre les cloches sonner. Ma grande-tante a ete marraine d’une cloche quand l’eglise de sa petite ville a ete rebatie apres la guerre de 39-45. Peut-etre pour remercier son mari qui avait fourni du materiel et de la main-d’oeuvre.
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J’habite à côté de l’église de mon bourg et les cloches qui sonnent toutes les heures ne m’ont jamais dérangé. Il n’y a pas de cloches aux États-Unis ???
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