
« GLA GLA GLA GLA ». Nos ancêtres ont dû souffrir bien davantage que nous du froid : le feu pour seul chauffage, des habitations sommaires et mal isolées, il fallait parfois compter sur la chaleur humaine ou animale pour se réchauffer. La saison froide devait sembler bien longue, surtout lors de certains hivers exceptionnels comme en 1709 ! Celui-ci fut particulièrement redoutable sur toute la France à tel point que de nombreux curés dans tout le royaume ont relaté ses effets dévastateurs ! Dans les actuelles Deux-Sèvres, j’en avais évoqué les conséquences à Chanteloup et Sylvie, mon épouse, en avait parlé pour Fenioux. J’ai trouvé depuis, dans plusieurs autres registres paroissiaux de mon département, des comptes-rendus glaçants de cet hiver. . J’ai comparé les styles. La manière de raconter révèle sans doute un peu la vision du monde des différents prélats.
- Naturelle : Au commencement de cette année, le froid a été si rude qu’il a gelé tous les arbres verts ensemble, les ajoncs, les genêts et fendu plusieurs chênes, noyers, cerisiers et autres, tué tous les petits oiseaux et nombre de gros, tant domestiques qu’autres, plusieurs animaux, cochons et brebis… AD79 Germond 1699-1720 BMS, vue 92
- Poétique : L’arrivée du printemps ne fait pas sentir, cette année ici, comme les autres, l’agrément qu’on avait coutume d’y trouver, il n’est pas accompagné comme à l’ordinaire de la douce harmonie du chant des petits oiseaux parce qu’ils sont presque tous morts par la rigueur et la longueur de l’hiver. AD79 Pamplie 1650-1730 BMS, vue 229
- Économique : Car presque tous les blés en ont été gelés et on peut compter pour rien ce qui a resté en telle sorte qu’on a été obligé de semer au printemps tout comme si on ne l’avait point fait auparavant l’hiver mais comme cette saison ne permet pas de mettre en terre toutes sortes de grains, on a eu recours aux baillarges et blés noirs, ce qui les a fait valoir un prix pour ainsi dire incroyable puisque la baillarge s’est vendue pour semer au mois de mars, avril et jusqu’au quinze de mai 1709, quatre livres dix sous, et le blé noir vingt-quatre livres le boisseau et communément dix-huit et vingt livres et au mois de septembre suivant le froment a valu pour semer, lorsqu’il était bon et nouveau, dix livres et le seigle cinq livres, et le reste de l’année et même jusques à la récolte de l’année 1710… AD 79 Fenioux 1699-1721 BMS vues 156 et 157
- Économique (bis) Cette année a été une des plus rudes qu’on ait eu depuis le grand cher temps et même plus rude selon le rapport que nous en on fait les anciens qui l’avaient appris de leurs pères. Tous nos blés ont péri par la gelée aussi bien que tous les noyers et tous les châtaigniers les uns entièrement et les autres qui poussent au bridier (?) c’est à dire que toutes les branches sont gelées qu’il faut [?] pour tous les noyers sont tous gelés. On fera semer de l’avoine qui fut la nourriture de la Gâtine avec abondance de baillarge qu’on recueillit en plaine dont le boisseau s’est vendu 4 livres, mesure de Champdeniers et un sou, mesure de Parthenay. Les pauvres ont souffert jusqu’à la mort et plusieurs en ont été enlevés. Les vignes et les choux ont été leur nourriture pendant 6 mois. J’ai acheté pour 200 livres de blé y compris 3 septiers pour 75 livres. AD79 La Boissière-en-Gâtine BMS 1693-1750 vue 106
- Macabre : On trouva à Saint-Martin un homme mort de froid (un pauvre étranger passant mort de cette nuit) qui fut inhumé dans cette paroisse le 13 janvier et plusieurs furent trouvés ailleurs. AD79 Pamproux 1700-1710 vue 75
- Prosaïque : Il y a eu dans cette année 1709 quatre choses très remarquables, le grand froid, la disette de grain par conséquent la famine bien grande, plusieurs et grands impôts et une très grande guerre. Et le pis de tout disette de vin. AD79 Chanteloup BMS 1701-1736, vue 94

Il ne me manque plus que le prêtre quasi mutique qui écrirait « GLA GLA GLA GLA ».
La dernière est extraordinaire : « et le pis de tout disette de vin »… 😉
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C’est aussi ma préférée, d’autant plus que c’est une de mes premières trouvailles quand j’ai commencé la généalogie. Le vin, j’en reparlerai demain avec H comme…
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Bonjour,
Très bonne idée le thème de ce billet… Edifiant et les citations sont très riches ! La dernière est en effet remarquable !
Bonne journée,
Guillaume
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Merci de la part du curé de Chanteloup et de ses confrères ! 😉
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Allons! Allons! Peut-etre que le manque de vin l’empechait de celebrer la messe proprement….. Mais sans rire ces hivers rigoureux etaient autant de drames dans la vie deja difficile de nos ancetres.
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J’ai tendance à croire que la disette de vin était aussi un drame presque aussi important que la disette de grain. Mais je ne veut pas dévoiler mon article de demain. H comme…
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Belles découvertes 🙂 Merci de les partager !
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Merci pour ces belles archives insolites et cette sympathique classification ! L’hiver 1709 nous offre plus de 20 mentions dans les registres paroissiaux de la Vienne ! Et l’ensemble des hivers 96 mentions !
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Gla Gla Gal aussi à Colombier en Brionnais en Saône et Loire en 1709.
Voir mon article http://voyager-avec-mes-ancetres.blogspot.fr/2015/06/i-comme-insolites.html Le curé avait décrit en détail les difficulés de cet hiver là.
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