Littérature et généalogie
La Petite Poule d’Eau : nos cousins canadiens.
Depuis que je fais ma généalogie j’espère trouver une personne qui ait immigré vers le Québec. Dans ma région, le Poitou, c’est plausible car nombreux sont ceux qui ont pris le chemin de l’exil, souvent pour des raisons religieuses. Hélas ! jusqu’à maintenant je n’ai pas trouvé de lien entre mes ancêtres et le Canada, mais j’ai toujours plaisir à lire des histoires qui s’y passent, et parmi celles-ci, j’apprécie particulièrement celles de Gabrielle Roy.
Les généalogistes français font souvent des recherches sur le départ vers le nouveau monde et l’arrivée au Canada, mais finalement s’intéressent beaucoup moins à la vie quotidienne après l’installation et à l’histoire des générations suivantes. Avec La Petite Poule d’Eau, publié en 1950, Gabrielle Roy nous raconte la vie dans le Manitoba à la fin des années 1930, une région de lacs où l’homme est peu présent. Le roman se compose de 3 récits autour des Tousignant, des Canadiens francophones. Luzina et Hippolyte, tout jeunes mariés, sont venus s’installer dans ce coin perdu, au nord de Rorketon. Hippolyte est l’intendant de l’île de la Petite Poule d’Eau, chargé de s’occuper des moutons du propriétaire. La famille est la seule à vivre ici.
J’ai une tendresse toute particulière pour le premier de ces récits Les vacances de Luzina. C’est une véritable expédition qu’entreprend Luzina vers la ville, si lointaine d’accès, surtout au cœur de l’hiver. Pourtant, même si elle a envie de partir, au moment des adieux rien ne compte plus que le déchirement de laisser les enfants qu’elle quitte pour quelques jours seulement.
Les plus jeunes enfants étaient restés sur la petite île et, à ce moment, ils firent leurs adieux à leur mère. Ils pleuraient tous. En ravalant des larmes et sans cris ; ils comprenaient qu’il était trop tard pour la retenir. Les petites mains, sans suspendre un seul instant leurs mouvements, s’agitaient dans la direction de Luzina […]
Soyez bons, recommanda-t-elle à ses enfants, enflant sa voix que le vent emporta en une tout autre direction. Obéissez bien à votre père.
L’école de la Petite Poule d’Eau, le deuxième récit, parle de la difficulté à scolariser des enfants quand on vit loin de tout, qui plus est dans une région anglophone. C’est encore Luzina qui prend les choses en main, elle écrit au gouvernement et finit par obtenir qu’une enseignante rejoigne leur île pendant les mois d’été pour permettre à ses enfants de poursuivre leur scolarité.

Gabrielle Roy, qui fut enseignante, a fait l’expérience de ces classes d’été dans cette région de Rorketon. C’est à partir de ses souvenirs qu’elle a eu l’idée de La Petite Poule d’Eau. Elle nous raconte la vie sauvage avec tendresse et poésie ; c’est simple, touchant et on y croit.
Dans ce roman, et sans déflorer l’histoire, on découvre les Tousignant et leurs nombreux enfants, mais aussi leurs liens avec le reste de la famille demeurée au Québec, les échanges épistolaires et réels ainsi que l’importance et la force de ces échanges familiaux. La vie des Tousignant me rappelle celle de ma famille poitevine au début du XXe siècle. Les ancêtres de Luzina et Hippolyte ont traversé un océan et la moitié du continent américain pour finalement reproduire la même vie au Canada. Avec une nuance cependant, les hivers canadiens ne ressemblent pas à ceux du Poitou !
Si vous aimez ce type de récit, à la fois proche culturellement et lointain géographiquement, vous pouvez aussi lire les 9 tomes de Magasin général, le cycle de BD de Loisel et Tripp. Les auteurs nous racontent la vie d’une petite communauté villageoise isolée au Québec dans les années 1920. Nous y découvrons des personnages attachants que nous suivons au fil des années et des volumes.
Enfin, pour revenir au roman, je ne peux que vous conseiller les livres de Michel Tremblay, notamment La diaspora des Desrosiers qui compte à ce jour 9 tomes. L’auteur raconte l’histoire de son héroïne, Nana, depuis le Manitoba jusqu’à Montréal. Dans une langue truculente, le joual est présent à chaque page, nous faisons connaissance avec elle et partageons sa vie, celle de ses grands-parents, sa mère, ses tantes…. Une belle saga familiale !
Tiens c’est marrant car en Maurienne il y a une vague de migrations à la fin du XIXe siècle pour le Manitoba. Ces références me serviront certainement lorsque je me pencherais vers l’histoire de familles parties pour le nouveau monde ! Votre challenge est vraiment bien je me régale au fil des semaines et les ouvrages cités semblent tous de très bonne qualite. Bravo !
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Merci beaucoup, tant mieux si notre petit challenge fait des heureux.
Toute La petite poule d’eau se passe dans le Manitoba, avec de belles descriptions de la nature et de l’hiver, tu y trouveras de la matière pour imaginer la vie de tes émigrés de la Maurienne .
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