
Réprimer la Commune de Paris et passer l’arme à gauche
Eugène URBAIN est le seul soldat des Deux-Sèvres que j’ai retenu pour ce challenge à ne pas être né dans le département. Il a vu le jour le 8 novembre 1850 à Buzançais (Indre), fils d’URBAIN, journalier, et de Marie PERROCHON son épouse. Il semble s’être fait appeler toute sa vie Eugène FARINE. Son père est un enfant trouvé originaire des Deux-Sèvres. Ce dernier s’est marié dans l’Indre où le couple semble avoir vécu le temps de faire un enfant avant de revenir dans notre département. Le patronyme de cette famille a prêté à confusion puisqu’elle se fait nommer selon les actes FARINE, FIATREAU FILLATREAU… Une décision de justice du tribunal de Bressuire en 1879 a essayé de démêler tout ça en rétablissant le nom d’URBAIN sur tous les actes antérieurs.
En 1870, l’année de la guerre, Eugène URBAIN (donc, et non FARINE) passe devant le conseil de révision à Argenton-Château. Il exerce le métier de tailleur de pierres à Argenton-l’Église, mesure 1 mètre 70 et sait lire et écrire. Il a les cheveux et sourcils châtains, le front découvert, les yeux gris, le nez ordinaire, la bouche grande, le menton rond, le visage ovale et le teint coloré. Il intègre le 32e régiment d’infanterie le 13 octobre 1870 et prend part aux combats contre la Prusse. Il traverse le conflit indemne jusqu’à l’armistice en janvier 1871. Il n’est pas libéré pour autant ni sorti d’affaire puisqu’il est envoyé quelques mois plus tard combattre la Commune de Paris.
La Commune de Paris est une insurrection entre le 18 mars et le 28 mai 1871. Elle s’oppose au gouvernement d’Adolphe THIERS issu de l’Assemblée nationale élue suite à la capitulation française. La capitale avait beaucoup souffert pendant la guerre subissant un long et difficile siège. Les élections législatives nécessaires pour ratifier l’armistice sont faites dans l’urgence. Elles voient la victoire le 8 février des monarchistes élus par les circonscriptions rurales sous influence des notables et de l’Église. Les habitants de Paris sont frustrés de ne pas voir se confirmer le mouvement né de la chute du Second Empire. Ils n’acceptent pas les conditions de l’armistice qui prévoit l’occupation de Paris alors qu’ils n’ont pas cédé face à l’armée prussienne. Le 18 mars, Adolphe THIERS veut rétablir son autorité sur la capitale en ordonnant à l’armée de récupérer les canons à Belleville et Montmartre. L’opération ne se passe pas comme prévu, c’est le début de la Commune de Paris qui va durer 3 mois et s’achever tragiquement par la semaine sanglante. Le nombre de Communards décédés pendant cette seule semaine varie de 5 000 à 20 000 selon les estimations, morts durant les combats ou fusillés sans procès. Il y eut aussi des victimes dans le camp « versaillais » : 50 à 100 otages ont été exécutés et 400 à 900 soldats de l’armée active envoyés par le gouvernement pour rétablir l’ordre ont péri dans ce combat fratricide.
Ce fut sans doute le cas d’Eugène URBAIN, mort le 10 juin 1871 à 11 heures trois quart du soir à l’hôpital militaire de Versailles. La cause de son décès n’étant pas précisée sur l’acte, je suppose, peut-être à tort, que c’est des suites de blessures. 11 autres Deux-Sévriens sont morts pendant la Commune de Paris dont Pierre AUDEBRAND d’Azay-sur-Thouet, Pierre Baptiste BERNARDEAU de Maisontiers, Louis BERTRAND de Coulon… Le Cercle généalogique des Deux-Sèvres les a inclus dans le Mémorial des victimes de la guerre de 1870, considérant que la Commune de Paris est la conséquence directe de la défaite face à la Prusse. C’est le choix qu’avait également fait le maire d’Argenton-l’Église en déclarant en 1880 qu’Eugène URBAIN était décédé suite à la guerre de 1870.
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