Littérature et généalogie
La légende arthurienne : une large paternité.
On ne sait pas qui a écrit La Demoiselle à la mule, Le Chevalier à l’épée, Gliglois, Hunbaut, L’Âtre périlleux, Les Merveilles de Rigomer, Le roman de Jauffré, Le Chevalier au papegau… Tous ces livres dont les auteurs nous sont inconnus font partie de la légende arthurienne née aux alentours du VIe siècle. Cette littérature purement celtique au départ s’est enrichie au contact du roman courtois français (Chrétien de Troyes), d’auteurs allemands (Wolfram von Eschenbach), italiens (Rusticien de Pise) ou anglais (Geoffrey Chaucer). Elle traverse les siècles jusqu’à aujourd’hui. Des auteurs, depuis le XIXe siècle, perpétuent le cycle : des Anglais comme Tennyson, Tolkien ou Morpugo, des Français comme Appolinaire, Barjavel ou Gracq, et même des Américains comme Steinbeck.
Ce cycle littéraire est donc un peu comme nos arbres généalogiques : on retrouve ses racines en remontant les siècles, en visitant différents pays, et, comme en généalogie, certains parents restent à jamais inconnus. Il est aussi un peu comme nos familles, il se modernise, s’élargit à d’autres domaines : la musique (Purcell et Wagner), le cinéma (Thorpe, Hattaway, Bresson, Rohmer, les Monty Python, Boorman) la télévision (Astier), et (vous vous doutez peut-être que j’allais y arriver) la bande dessinée.
Dans ce genre littéraire, la référence absolue est Prince Valiant de Hal Foster. Il s’agit d’ailleurs plus de texte mis en images (il n’y a pas de bulles, les planches sont le plus souvent un « gaufrier » de 9 cases) que de BD. L’œuvre est réputée par le talent graphique du dessinateur. Foster est aussi très à l’aise pour restituer l’univers médiéval et légendaire autour du roi Arthur. Prince Valiant, le jeune héros qu’il a créé, évolue au milieu des chevaliers de la Table ronde et à la Cour de Camelot. Nous le retrouvons donc avec Lancelot, Gauvain, Merlin, Morgane et Guenièvre, dans des histoires où on retrouve de l’aventure dans l’esprit des romans de chevalerie, mais aussi de la romance dans l’esprit des romans courtois !
Le cycle arthurien a donc de nombreux pères et quelques mères (Marie de France, Marion Zimmer Bradley…). N’essayons pas d’en faire l’arbre généalogique, ni même celui du roi Arthur. Il pourrait certes plaire à ceux qui aiment la complexité : ainsi, Arthur et sa demi-sœur Morgane sont les parents de Mordred ; de plus, comme pour les divinités grecques ou comme pour les plus anciennes dynasties, les sources se contredisent. Certains s’y sont lancés sur Généanet (il y a 6 pages de réponses pour une recherche sur Arthur Pendragon) et plusieurs prétendent même descendre du roi de Camelot. Peut-être veulent-ils rejoindre la légende arthurienne ? On peut plus simplement visiter la belle exposition aujourd’hui virtuelle de la BnF intitulée La légende du roi Arthur.
Et puis parfois, une légende doit rester une légende 🙂
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C’est sûr. Il faut accepter parfois que nos racines soient culturelles plutôt que familiales ou héréditaires.
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