
Quand on veut associer un moulin à une guerre, on pense immanquablement au moulin de Valmy, site de la première victoire de la tout jeune République, le 20 septembre 1792, contre le camp des émigrés et des pays qui les soutiennent. Ce jour-là, l’armée française commandée par les généraux Kelermann et Dumouriez bat l’armée prussienne du duc de Brunswick.
Il y a pourtant eu, un mois auparavant, une bataille également située près d’un moulin, dans les Deux-Sèvres, qui aurait pu avoir le même retentissement historique : c’est celle du moulin de Cornet, le 24 août 1792. Ce moulin à vent situé sur la commune de Terves, près de Bressuire, supplée en été le moulin à eau du même nom quand la rivière n’a plus assez d’eau pour faire tourner sa roue. Il appartient à cette époque au meunier François Baudry, (1750-1805), issu d’une famille de fariniers de Cerizay et installé à Terves avec son épouse Perrine Savarit (1750-1815).

Les premiers mois de l’été 1792 sont très agités aux environs de Bressuire : les communes doivent lever des jeunes volontaires pour défendre la République et, dans le même temps, paraissent les premiers décrets contre les prêtres réfractaires. Dans les paroisses rurales du bocage, tout cela passe mal. Des paysans se soulèvent, sèment la pagaille dans plusieurs bourgs et plus de 2000 d’entre eux finissent par se rassembler à proximité du moulin de Cornet pour encercler la ville de Bressuire, citadine et républicaine, mais ils sont attendus par la troupe. Le 24 août, c’est le cœur de l’été, les ailes du moulin à vent tournent peut-être au dessus d’un combat qui voit la déroute des rebelles et la mort de 300 à 600 paysans.
La bataille du moulin de Cornet n’est pas restée dans les mémoires. Les royalistes ont préféré l’oublier car ce fut une défaite cinglante pour les révoltés peu disciplinés et peu armés. Le camp républicain ne pouvait guère s’en vanter car ce fut davantage un massacre accompagné de nombreux actes de barbarie qu’une victoire militaire. Cette bataille pesa peut-être sur la décision de mes ancêtres Jacques Giret et Marie-Jeanne Bodin, meuniers au moulin de Couard et proches voisins du moulin du Cornet, de fuir la région et de se réfugier à Poitiers un an plus tard, en pleine période des guerres de Vendée.
Si le moulin de Cornet est un peu oublié quand on évoque cette guerre civile, ce n’est pas le cas des moulins à vent dans leur ensemble car ils appartiennent à la légende vendéenne. Ils ont servi de moyen de communication aux habitants : selon la position de leurs ailes, les paysans étaient appelés à se rassembler pour combattre ou alertés d’un danger proche. Et ils en ont payé le prix : nombreux sont ceux qui ont été détruits lors du passage des colonnes infernales. C’est le cas du moulin de Cornet qui était en ruine à la fin de 1793 et qu’il a fallu reconstruire, une fois la paix rétablie.
PS : Non loin de Cornet, il existe un autre endroit, le bois du Moulin-aux-Chèvres entre Mauléon et Bressuire, où se déroulèrent 2 importantes batailles des guerres de Vendée en 1793. On pourrait penser qu’elles se sont déroulées à proximité d’un moulin. Mais si l’existence du bois est attestée, je ne trouve pas trace de la présence de moulin à cette époque (ni de chèvres d’ailleurs).
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