
Au recensement de 1872, Joseph Briffaud déclare être ingénieur aux mines de Saint-Laurs. Pour occuper ce poste à responsabilités, on a fait appel à un homme venu du sud de la France et qui a su gravir un à un les échelons pour y parvenir.
Joseph Briffaud est né à Alès (Gard) 41 ans plus tôt, le 11 février 1831. Il est le fils d’un propriétaire, Raymond Briffaud, et de Rose Gabourdet son épouse. Il ne se souviendra pas de sa mère qui décède le 12 octobre 1832 alors qu’il n’a pas 2 ans. En 1840, quand Joseph à 9 ans, son père se remarie à Portes (Gard) avec Philippine Dautun. Il se retrouve très vite l’aîné d’une demi-sœur, Célina.
Alès est au XIXe siècle une ville industrielle grâce à l’exploitation de la houille. Peu après la naissance de Joseph, en 1836, des mines de charbon sont découvertes et exploitées à La Grand-Combe, tout près du lieu de résidence familiale et cela va lui offrir, une fois adulte, des perspectives professionnelles. Sans doute est-il passé à l’école des mines d’Alès tout juste ouverte en 1843 pour former les maîtres mineurs.
Le 5 octobre 1852, quand il épouse à Laval-Pradel (Gard) la jeune Justine Bialès déjà bien enceinte, il est soldat au 16e RI mais il déclare aussi être mineur de houille. L’union ne dure malheureusement que quelques mois puisque la mariée de 21 ans décède le 28 février 1853 des suites de l’accouchement d’un enfant mort-né.
Le 20 septembre 1853, il se remarie avec Sylvie Dardailhon toujours à Laval-Pradel. Il est alors maître mineur. Est-ce pour profiter d’une opportunité professionnelle ou pour des raisons familiales que le couple se retrouve à Saint-Laurs peu de temps après leur mariage ? Joseph y est embauché aux mines comme chef mineur. Le 6 juillet 1854 nait leur fille Marie qui ne vivra qu’une petite heure et, un an plus tard, le 11 mai 1855, leur fils Paul. Le père est toujours chef mineur et la mère déclare être couturière. Hélas, le 19 septembre 1856, elle décède au même âge que Justine, la première épouse de Joseph, à seulement 21 ans.
A 27 ans, père d’un petit garçon de 3 ans, Joseph se marie pour la troisième fois : il épouse le 25 mai 1858 à Saint-Laurs Angélique Hartmann, 21 ans, fille d’un mineur décédé venu du Finistère. Ses témoins de mariage sont le directeur des mines Paul Poirier et le futur directeur Amédée Schmitt. Le mariage va durer cette fois. Quatre enfants, Marie, Claire, Thérèse (qui ne vit que 10 jours) et Joseph naissent entre 1859 et 1868. La promotion sociale continue pour le père : il est sous-ingénieur vers 1858, ingénieur en 1861.
Les ingénieurs sont responsables des services techniques. Ils font la liaison entre le monde ouvrier et le patronat comme ils descendent régulièrement au fond pour constater l’avancée des travaux. Ils sont secondés dans leur tâche par les maîtres-mineurs. Cela implique de suivre les travaux à faire dans les mines et de penser à la sécurité des ouvriers : ils doivent veiller notamment à l’aération et à la solidité des puits et des galeries. En tant qu’ingénieur, à Saint-Laurs, c’est Joseph Briffaud qui est appelé quand un mineur décède accidentellement sur son lieu de travail. C’est le cas en 1858 après la chute mortelle de Jean Legrand au puits Sainte-Marie :
La victime [Jean Legrand] ne donnait plus aucun signe de vie d’après les ordres de M. Briffaud, le cadavre a été monté au jour et transporté dans une chambre de l’établissement (rapport interne sur l’accident).
Nous nous sommes rendus sur les lieux où nous avons trouvé M. Briffaud, sous-ingénieur à cette mine, il nous a introduits dans le bureau du chef mineur, nous y avons trouvé le corps du malheureux Legrand étendu par terre… (procès-verbal de gendarmerie).
Au début de l’année 1872, lors du recensement, notre ingénieur habite à proximité de son lieu de travail, au « château » des mines avec toute sa famille excepté Paul, le fils aîné, qui a déjà quitté le foyer.

L’ascension sociale n’est pas finie. Suite à la démission d’Amédée Schmitt, le 15 juin 1872, le conseil d’administration des Houillères le nomme directeur. Il garde ses responsabilités sur les travaux des mines et doit désormais gérer des affaires commerciales. Est-ce la consécration pour cet homme qui a commencé mineur ? Est-ce une revanche sur la vie pour lui qui a été deux fois veuf ? Le destin s’acharne sur certains plus que d’autres et Joseph ne profite pas très longtemps de sa dernière promotion. Il meurt 6 mois plus tard, le 11 décembre 1872, âgé de 41 ans. Il est remplacé à la direction par Paul de la Fare, petit-fils du marquis de Nettancourt. Après son décès, la veuve, Angélique Hartmann, et les enfants de son dernier mariage qui n’ont plus de raisons de rester sur la commune quittent Saint-Laurs pour s’installer à Orléans.

Encore une histoire bien triste, 2 jeunes femmes décédées bien jeunes, des enfants en bas âge également, et Joseph à seulement 41 ans. Il n’était pas resté veuf très longtemps lors du décès de sa 1 ère épouse.
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Quel joli thème ! J’aime l’idée de ce village qui lettre après lettre, se reconstruit et vit autour de ses puits en 1872. Merci pour cette aventure !
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