Quitter le Cézallier pour le Poitou

Cet été, nous sommes partis randonner sur le plateau du Cézallier, dans le Cantal. Ce fut l’occasion pour moi de découvrir les lieux d’origines d’une branche de mes ancêtres paternels.

Saint-Bonnet-de-Condat

François RAIMOND, mon aïeul à la 9e génération, est né à Saint-Bonnet-de-Condat en février 1694. Il est le fils de Louis RAIMOND, originaire de ce même village, et de Jeanne ROCHE, née dans la paroisse voisine de Saint-Saturnin. Les 2 communes ne sont distantes que de 3 kilomètres. Pourtant, même si Louis et Jeanne n’ont pas eu besoin de traverser la Santoire, la rivière qui serpente entre les 2 bourgs, ils vivent dans des lieux-dits plus éloignés, lui à la Massugère et elle à Soulages.

Je n’ai pas trouvé leur acte de mariage, mais j’ai la chance de disposer d’une copie de leur contrat de mariage passé chez Charles JUlHIEN, notaire à Saint-Saturnin (merci Liliane).

J’y apprend que leurs 2 pères sont décédés, Louis et Jeanne sont accompagnés ce jour-là par leurs mères. Après le mariage, le couple s’installe à Saint-Bonnet, à la Massugère auprès de la mère de Louis. Je leur connais 3 enfants, mon aïeul François est l’aîné et il a 2 sœurs, Antoinette et Jeanne. Cette dernière meurt à l’âge de 7 ans.

La vie est dure sur le plateau du Cézallier, zone montagneuse de l’Auvergne. Les paysans y habitent des maisons de pierre aux toits de chaume ou de lauzes adaptées aux rigueurs du climat avec des hivers longs et rudes et des chutes de neige fréquentes. Les habitations sont souvent composées d’une seule pièce où se concentre toutes les activités quotidiennes. La vie y est difficile surtout durant les mois les plus froids. Les villages sont petits, regroupant quelques dizaines de foyers et l’habitat est dispersé. C’est le cas de la Massugère, ce petit hameau où vivent Louis RAIMOND et les siens ne compte qu’une ou deux fermes. L’élevage est au cœur de l’économie paysanne du Cézallier. Louis possède sans doute quelques vaches, des moutons et peut-être des chèvres. Les animaux fournissent la laine et la viande, le lait et bien sûr le fromage, ils servent aussi comme animaux de trait. Aux beaux jours, les bêtes sont menées vers les pâturages en altitude.
La vie quotidienne suit le rythme des saisons. L’été, les jours sont longs et le travail ne manque pas depuis les semailles jusqu’aux récoltes. À cette période, il faut parfois faire appel à de la main d’œuvre venue du Limousin pour aider aux champs. L‘hiver par contre, tout ralentit et chacun se concentre sur les tâches domestiques, d’autant plus que les routes sont impraticables. Si une main d’œuvre nombreuse est nécessaire à la belle saison, dès la fin de l’automne chaque famille se retrouve avec beaucoup de bouches à nourrir sans avoir de travail pour occuper chacun. De plus, ici comme ailleurs, l’on n’est pas à l’abri d’une mauvaise récolte qui entraîne des périodes de grande précarité. La survie dépend alors des capacité à faire des réserves pour l’hiver et à gérer les ressources alimentaires de manière économe.
Dès lors, on comprend aisément que les hommes se soient tournés vers l’exode.

Dans le Massif Central, beaucoup partent après les moissons et reviennent au printemps quand les chemins sont à nouveaux accessibles et nombreux sont ceux qui deviennent marchants. Les chefs de famille du Cézallier sont plutôt chaudronniers colporteurs. Ils partent en groupe, à pied ou avec des mules, vers toutes les régions de France et certains vont même jusqu’en Espagne. Ce sont de longs voyages souvent dangereux, entre les difficultés du trajet liés au climat et aux accidents, les maladies et bien sûr les risques de croiser des brigands et des voleurs.
Beaucoup d’entre eux font leur testament avant d’entreprendre un périple dont ils ne sont pas sûrs de revenir. Les hommes des familles ROCHE et RAIMOND en ont sans doute fait un : il fallait que tout soit clair quant à la répartition de leurs biens et les dots des filles s’ils ne revenaient pas. Et puis, ces testaments comprenaient aussi des clauses concernant le repos de leur âme, chose importante pour ces catholiques.

Le colportage, c’est avant tout un revenu d’appoint pour les familles. Les hommes sont des vendeurs ambulants qui portent leurs marchandises sur les routes. Ils négocient leurs marchandises et/ou leurs services tout au long du voyage et ramènent à leur retour des denrées rares mais aussi de l’argent. Chaque groupe adapte ses déplacements au calendrier des marchés sur leur chemin.

Antoine Watteau, Étude de colporteur, © RMN-Grand Palais

Parmi ces chaudronniers colporteurs, se trouvent Jean et Maurice ROCHE, frères de Jeanne et oncles de François RAIMOND. Jean est l’aîné, il s’est marié à Saint-Saturnin mais il est probable qu’il a fait plusieurs fois le voyage entre son village et le Poitou, sans doute accompagné d’autres voisins ou parents. Tous prennent la direction de Niort, un périple de plus de 300 kilomètres semés d’embûches et de dangers. Les naissances des enfants de Jean ROCHE nous permettent de savoir qu’il est rentré chaque été chez lui.
Quelques années plus tard, son frère Maurice se joint au groupe. Ces déplacements permettent de tisser des liens en Poitou. Maurice, comme son frère, fait d’abord le voyage chaque année. Bientôt, il rencontre une jeune fille d’Échiré près de Niort, il l’épouse et s’installe dans le village de sa femme. Il poursuit sans doute son activité de marchand chaudronnier mais ne sera plus itinérant.

Les années passent, mon ancêtre François RAIMOND a grandi. Il va suivre les traces de ses oncles et quitte à son tour Saint-Bonnet-de-Condat pour le Poitou. On peut être sûr que c’est avec un groupe du Cézallier et son oncle Jean qu’il fait son premier voyage. Avait-il envie d’une vie de colporteur ? Il a sans douté préféré s’installer comme paysan en Poitou : sans être facile, la vie de laboureur y est plus douce que dans son village. Son oncle Maurice qui est déjà marié dans la région lui a peut-être présenté des jeunes filles. En novembre 1719, il épouse à Saint-Gelais, Jeanne CHARLES, fille d’un charpentier protestant. Il s’y installe comme laboureur et ne quittera plus son village poitevin d’adoption. François donne le prénom de l’oncle Maurice à son premier né, hommage à celui qui représente maintenant toute sa famille loin de son village natal.
François RAIMOND et Jeanne CHARLES accueilleront au moins 12 enfants, qui seront laboureurs, sabotiers ou encore maréchaux, mais aucun ne connaîtra le plateau du Cézallier et Saint-Bonnet-de-Condat.

Merci à Liliane pour le partage de ses connaissances sur le Cézallier et la famille ROCHE et merci à ChatGPT qui a complété mes connaissances !

4 commentaires sur “Quitter le Cézallier pour le Poitou

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