À tous ceux qui désespèrent de remonter une branche difficile à escalader comme Sylvie qui cherche sur sa lignée agnatique, je veux offrir ici un peu d’espoir à l’approche de Noël. Grâce soit rendue à mon entêtement, je viens de débloquer l’ascendance de mon Sosa 228, François Baudouin de Courlay.
La recherche n’était pourtant pas facile dans les registres de cette paroisse : feuilles abimées, encre pâlie, écriture des curés successifs peu soignée, années disparues, actes manquant de façon erratique, rédaction souvent sommaire… tout ce à quoi nous sommes confrontés en généalogie. C’était comme lire un livre où il manquerait la moitié des mots. Pourtant je sentais bien que j’y trouverai quelque chose : il y avait beaucoup de Baudouin, presque trop, il me fallait ordonner tout cela.
J’ai bien du mal à explique ma méthode. Disons qu’il m’arrive d’être obstiné et même monomaniaque. Il m’a fallu déjouer de nombreuses fausses pistes ! De François Baudouin, je n’avais que la signature, l’acte non filiatif de son second mariage en 1764 et les actes de baptême et parfois mariage ou décès de ses enfants. Aucune trace de sa naissance, de son décès ou de son 1er mariage ! Sans vouloir expliquer tous les chemins de ma recherche (ils sont trop longs et tortueux), je peux vous dire quels points ont été décisifs pour la découverte.
– Le nom : Comme il y a de nombreux Baudouin sur Courlay, j’ai passé beaucoup de temps à faire, en parallèle à ma recherche, l’arbre de cette famille sans arriver toutefois à la relier à François. Ce travail ne fut pourtant pas inutile.
– Les dates : Comme les prénoms donnés aux enfants sont peu nombreux, il m’a fallu débroussailler les nombreux homonymies en m’aidant des dates de naissance par exemple. J’ai pu éliminer ainsi plusieurs hypothèses trop évidentes qui m’auraient fait marier François à 15 ans.
– Les toponymes : Le fait de noter les lieux-dits m’a bien aidé. Il existe de nombreux hameaux, fermes et écarts à Courlay, et celui de Puy-Arnaud où habitait François Baudouin a bien été utile pour me conforter dans mes hypothèses.
– Les témoins : J’étais très embêté car peu de Baudouin étaient présents aux actes concernant François Baudouin (à part un Alexis Baudouin qui m’intriguait). Par contre, je trouvais très souvent un nommé Pierre Maupilier mais je n’arrivais pas à l’apparenter. En effet, ce Pierre Maupilier était le fils de Pierre Maupilier et de Françoise Falourd ; sa femme, Marie-Anne Charbonnier, était la fille de Jacques Charbonnier et de Marie Violeau : pas moyen de les relier au patronyme de Baudouin !
– Les signatures : J’ai longtemps buté sur la fausse piste d’Alexis Baudouin, fils de Pierre Baudouin et de Jeanne Jottreau que je supposais être frère ou proche cousin de François. En reprenant toutes ses signatures, je me suis rendu compte que je pouvais les classer en 2 groupes, celle où je voyais Alexit et celles où je voyais Allexi. Il y avait en fait 2 homonymes, à l’écriture assez proche mais, heureusement, à l’orthographe différenciée. Celui qui m’intéressait était beaucoup plus rarement dans les actes, car sans doute célibataire.C’est en lisant l’acte de mariage de Pierre Maupilier, le multi-témoin, avec Marie-Anne Charbonnier, que j’ai eu le début de la solution. J’aurais dû le faire plus tôt, je m’étais contenté de faire confiance au relevé du Cercle généalogique des Deux-Sèvres. Celui-ci n’était pas faux, loin de là, mais il ne donnait pas tout. À un moment ou à un autre, quand on a tout essayé, il faut bien se frotter à des actes sur lesquels on fonde peu d’espoir. Et là, j’ai découvert que la mère de Pierre Maupilier, Françoise Falourd, était remariée avec un nommé Benoît Baudouin, présent en tant que beau-père du marié. Ce deuxième mariage avait été fécond : ils avaient eu plusieurs enfants dont Pierre-Alexis Baudouin et j’ai pu ensuite vérifier que c’était bien lui l’Alexis, qui signait sur les actes concernant François Baudouin.
C’était pour moi maintenant bien plus qu’une intuition : Benoît Baudouin et Françoise Falourd, qui habitaient Puy-Arnaud, avaient eu un fils François, oublié ou disparu des actes de baptême. Et c’étaient Pierre-Alexis Baudouin, son frère, et Pierre Maupilier, son demi-frère, qui étaient présents aux actes concernant François et ses descendants. Mais il me manquait la preuve ultime. Et c’est là qu’interviennent les deux derniers points qui m’ont beaucoup aidé.
– L’entraide : Par acquis de conscience, j’ai recherché sur Geneanet s’il existait des arbres qui correspondaient à mon hypothèse. Je n’en ai trouvé qu’un seul qui attribuait un fils prénommé François au couple Benoît Baudouin-Françoise Falourd, mais sans autre précision. Comme cet arbre en ligne était particulièrement sérieux et fiable, je me suis permis d’interroger son auteur, Jean-François. Il m’a répondu très vite ceci : « Un des petits-fils de Françoise Falourd, de son premier mariage avec Pierre Maupilier, (…) épouse Renée Bordier, par contrat de mariage passé devant Maître François Jouyneau des Loges, notaire à La Chapelle-Saint-Laurent (Cote 3E 7332 – A.D. des Deux-Sèvres). Parmi les témoins du marié, est présent François Baudouin, son oncle. Si vous connaissez la signature de votre ancêtre François Baudouin, on peut la comparer à celle de François Baudouin qui signe au bas du contrat de mariage (…). »
– Les Archives : Comme tout n’est pas en ligne, il faut parfois se déplacer aux Archives et lire dans les vieux papiers. J’ai suivi le conseil de Jean-François et je ne le regrette pas puisque j’ai désormais l’acte notarié et signé qui valide enfin ma théorie.
Maintenant que j’ai la solution, elle semble évidente, mais il m’a fallu beaucoup de temps pour que tout s’organise. L’arbre des « Baudouin » de Courlay fait en parallèle m’a servi finalement : Benoît Baudouin en faisait partie. En rajoutant le père et la mère de François Baudouin sur mon arbre, j’ai ainsi pu lui mettre aussitôt une flopée de frères et sœurs, d’oncles et tantes, de cousins-cousines, de grands-parents, de grands-oncles et de grand-tantes !
Et je suis d’autant plus content de cette trouvaille que j’ai ainsi pu trouver un recteur des petites écoles, un instituteur et un maître d’école qui officiaient à la fin du XVIIIe et au début du XIXe siècle. Ce sont les premiers de la famille de mes ancêtres ayant le même métier que moi que je viens de découvrir. Et je n’en suis pas peu fier !
Une belle recherche, longue et laborieuse mais couronnée d’un beau résultat 🙂 Bravo !
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Merci Nat ! Je suis d’autant plus content que cette branche tout juste découverte me semble particulièrement intéressante et peut-être porteuse de futurs articles pour le blog !
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Article très intéressant. Plusieurs généanautes pourraient s’en inspirer avant de sauter sur la première homonymie trouvée.
Merci
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Merci Patrice. C’est sûr que l’homonymie est LE problème en généalogie et qu’il faut être toujours vigilant.
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Merci pour toutes ces explications. À nous de nous en inspirer lorsque l’on bute sur une difficulté qui semble, au premier abord, insurmontable…
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Merci Dominique. Et si en plus d’être entêté on est organisé (c’est ce qui me manque), alors là, tous les espoirs sont permis !
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Quelle enquête bien menée ! C’est une bonne idée de nous raconter ainsi ce parcours généalogique exemplaire.
Voilà qui confirme mon intuition, je pensais bien que Raymond était un professeur des écoles.
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Merci Marie. Je ne suis donc pas le seul à avoir de bonnes intuitions.
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Bravo pour cette recherche, et pour la façon dont elle est expliquée. La patience et l’obstination sont les qualités de base de tout généalogiste qui se respecte. Passer par les signatures et en comparer les graphies, c’est aussi un jeu auquel je joue régulièrement quand je fouille dans le Poitou, parce qu’ils s’appellent quand même tous de la même façon 😦
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Merci Brigitte. C’est vrai que la généalogie, c’est un jeu qui demande de la patience mais qui est 100 fois plus intéressant que n’importe quel jeu de patience ! Sinon, même s’ils s’appellent tous pareils, ils ont quand même parfois des noms rigolos, nos ancêtres poitevins : Jean Bitaudeau, Modeste Brouillard…
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Passionnante recherche comme je les aime. Une véritable enquête policière. Moi aussi je suis obstinée; j’ai retrouvé des ancêtres Hangouët grâce à la comparaison des signatures comme je l’ai expliqué sur mon blog. Finalement j’ai découvert une piste apparemment inexplorée ce qui m’a permis d’entrer en contact avec quelques généanautes.
Marie
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Merci Mam’elix. Je me doute bien que je ne suis pas le seul obstiné, c’est le cas de beaucoup de généalogistes !
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Bravo Raymond pour ta ténacité. Je croise les doigts pour arriver à démêler mon écheveau de Villecourt un jour aussi. Mais là les registres des notaires sont lacunaires… Bonne continuation
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Merci Benoît. C’est exactement ce que je voulais entendre, je ne suis pas entêté, je suis tenace. Bonne continuation à toi aussi.
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