
« La digne sœur et lui se chérissaient, et pour
Se réunir encor dans la main où l’on tremble
Et ne pas se quitter, ils moururent ensemble
De vieillesse. »
Théodore de Banville. Les Baisers de pierre
Pierre VALADE épouse Magdeleine GAIRAUT le 4 juillet 1746 à Sainte-Pezenne. Lui est originaire d’Echiré, une paroisse voisine, et il exerce le métier de jardinier. Le couple s’installe à Sainte-Pezenne où il passera toute sa vie. Pierre et Madeleine ont eu au moins 4 enfants, 2 filles et 2 garçons.
Le 24 mai 1790, tous les deux s’éteignent le même jour à la même heure. Des couples dont le conjoint survivant se laisse mourir dans les jours ou les mois qui suivent, c’est encore assez fréquent, mais mourir le même jour à la même heure, c’est la seule fois que je le rencontre ! Toute la famille est soudée dans ce drame puisque les enfants et les gendres sont tous présents pour dire un dernier adieu à leurs parents.

« le vingt cinq de mai ont été inhumé par moi curé soussigné Pierre Valade jardinier et magdeleine gairault époux et Epouse Décédé l’un et l’autre d’hier presqu’a la même heure… » et est ajouté en marge « l’homme et la femme de langueur ».

Si l’on recherche la définition de langueur, le Larousse nous dit : « Abattement physique ou moral qui se manifeste par un manque d’activité, d’énergie, de dynamisme : Maladie de langueur. Le Robert la définit comme : « État d’un malade dont les forces diminuent lentement -> dépérissement ; languir. Maladie de langueur. » Pierre et Madeleine était un couple vieillissant, ils avaient respectivement 70 et 67 ans. C’était peut-être un couple fusionnel. L’un et l’autre ont préféré partir en même temps plutôt que de survivre à leur conjoint : une histoire d’amour, même si elle finit mal.
Mourir de langueur évoque des décès sans cause bien déterminée. À cette époque, la médecine ne sait pas encore reconnaître certaines maladies, plusieurs peuvent se cacher derrière ces termes, comme le cancer rarement évoqué avant le XXe siècle.
Certaines études statistiques, même si elles sont sur un panel restreint, montrent que la langueur est présente dans les registres de décès. Ainsi, à Authon en Charente-Maritime, on relève entre 1854 et 1864 parmi les 193 morts 5 décédés de langueur (environ 1 %) ; de même, à Boston aux États-Unis où, sur 942 morts en 1811, on en compte 28 de langueur (plus de 3 %).
Sources :
Blog Chroniques du Poitou
Blog Lise Antunes Simoes. De quoi mourait-on, avant ? Et à quel âge ?
C’est intrigant… Mourir de langueur, soit. Mais à la même heure ?!?
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L’amour jusqu’au dernier souffle..
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Langueur, comment ne pas penser à un moment historique et au poème de Verlaine.
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Honte à moi, je ne connaissais pas ce poème de Verlaine.
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C’est une belle mort, non ? Ils étaient entourés de leur famille et n’avaient visiblement pas envie de lutter.
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Oui, être entouré des siens et se laisser partir ensemble c’est une belle mort, je suis d’accord.
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C’est effectivement rare de trouver des décès simultanés… C’est triste et attendrissant à la fois !
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Oui on a envie de croire qu’aucun des deux ne pouvaient / voulait survivre à l’autre.
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Belle découverte !
Mourir en même temps pourquoi pas, dans un accident. Mais de langueur ? C’est bien intrigant !
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En tout cas c’est la seule mention que j’ai croisée d’une mort « naturelle » quasi simultanée.
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La mort de ce couple pose des questions dont on ne connaitra pas la réponse.
J’ai rencontré un homme mort de tristesse, sans raison apparente, mais dépressif depuis longtemps. Il laissa une veuve qui a eu la force d’élever leurs 8 enfants.
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Mort de tristesse, c’est une formulation que je n’ai jamais lue. Dans ton exemple, il a fallu bien du courage à cette épouse !
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