Erreurs et mensonges dans l’état civil

Je n’ai pas pour habitude de dénoncer mais je dois dire que certains curés, certains maires et surtout certains déclarants ne nous aident guère dans nos recherches généalogiques. Ne pas donner tous les détails espérés, je me suis fait depuis longtemps une raison : ce qu’un acte ne m’apprend pas, un autre me le révélera peut-être. Mais être entraîné sur des fausses pistes et devoir démêler le vrai du faux est autrement problématique. Voici quelques exemples dans ma généalogie. J’ai limité mon enquête à mes sosas au XIXe siècle et je ne pense pas être exhaustif.

Les erreurs se trouvent le plus souvent dans les actes des décès. Les déclarants ne connaissent parfois rien de la jeunesse d’un défunt très âgé, même s’ils en sont parfois les enfants. Ainsi, certains se trompent sur les lieux de naissance d’un défunt et me voilà à compulser des registres où je ne trouverai rien.

  • Mathurin François Turpault (sosa 90) meurt à 71 ans en 1855 à Sanzay. L’acte dicté par son frère et son gendre se trompe. Il n’est pas né à Cirières mais aux Aubiers.
  • Sa femme, Jeanne Bernier (sosa 91) meurt à 75 ans en 1856 à Sanzay. Ses gendres disent qu’elle est née à Combrand au lieu de Nueil.

Plus embêtante, l’erreur peut être sur la filiation. Les déclarants se trompent sur l’identité des parents du défunt. Je préfère quand ils mettent « inconnu ». Je vous fais l’impasse sur les modifications du prénom du père ou de la mère explicables parfois, mais pas toujours, par l’usage. Je vous présente seulement les fausses pistes qu’il m’a fallu élucider liées au patronyme de la mère. Pour chacun de ces cas, il m’a fallu reprendre méthodiquement tous les actes antérieurs (les mariages notamment) et ceux des fratries pour arriver à une certitude d’erreur du déclarant.

  • René Bisleau (sosa 196) meurt à 60 ans en 1803 à Chanteloup : Son fils et son gendre disent qu’il est le fils de Marie Bonnin. Sa mère s’appelle en fait Renée Ganne.
  • Jeanne Suaud, (sosa 505) meurt à 71 ans en 1804 à La Chapelle-aux-Lys. Sa fille déclare qu’elle est la fille de Jeanne Bornet au lieu de Jeanne Coulais.
  • Pierre Deborde (sosa 32) meurt à 79 ans en 1879 à Terves. Sa mère ne s’appelle pas Rose Ponsard comme le disent ses 2 fils mais Pélagie Baudu.
  • Pierre Daguisé (sosa 62) meurt à 86 ans en 1888 à Saint-Maurice-des-Noues. Là encore, les 2 fils se trompent sur l’identité de celle qui est leur grand-mère paternelle en déclarant Françoise Deguil à la place de Marianne Grellard.

L’erreur peut même concerner le conjoint du défunt.

  • Jacques Billy (sosa 226) mort à 73 ans en 1810 à Bressuire. Les témoins sont ses 2 gendres. Il est écrit qu’il est le mari de Jeanne Jottreau à la place de Jeanne Fuzeau qui est pourtant toujours vivante.

Quelle est la cause de ces confusions ? L’erreur est humaine ! On peut penser à la distraction du scribe, à son audition défaillante ou à un patois mal compris qui transformerait une Jeanne Fuzeau en Jeanne Jottreau ou une Jeanne Coulais en Jeanne Bornet.
Dans certains cas, on peut émettre des hypothèses. Pierre Deborde n’a jamais connu sa mère Pélagie Baudu décédée peu après sa naissance. Il a été élevé par sa belle-mère Rose Turpaud qui était auparavant veuve de François Gaspard. Peut-être la considérait-il comme sa vraie mère ? Faut-il imaginer que « Rose Turpaud = Rose Gaspard = Rose Ponsard » ?
Le plus souvent, il s’agit d’une méconnaissance de la famille. Certains autrefois ignoraient ou mélangeaient les noms et prénoms de grands-parents qu’ils n’avaient jamais connus. Mais pourquoi Renée Ganne est-elle devenue Marie Bonnin, pourquoi Marianne Grelard est-elle devenue Françoise Deguil ? La surdité et l’étourderie me paraissent peu probables. Peut-être nos ancêtres mentaient-ils quelquefois, mais quel serait l’intérêt de mentir sur le nom de la mère d’un défunt ? En tout cas, soit ils se trompaient, soit ils nous trompaient.

J’ai la preuve de menteurs avérés avec la descendance de mon ancêtre Louis Grellier, sosa 132. Celui-ci résidait avec sa femme Marie-Anne Gabilly dans la paroisse de Boismé à la fin du XVIIIe siècle. Je n’ai donc aucun acte paroissial le concernant, les archives de cette commune ayant disparu 2 fois : pour l’original lors des guerres de Vendée, pour la copie, lors de l’incendie des Archives à Niort en 1805. Pour connaître la date de son décès, j’ai donc dû me reporter aux déclarations tardives faites aux mariages de ses enfants quand j’ai pu les trouver.

  • Quand sa fille Angélique se marie en 1807, elle dit que son père est mort très précisément le 3 juillet 1784, ce que confirme sa mère Marie-Anne Gabilly. Pourquoi pas ? Mais j’ai découvert que c’est forcément faux puisqu’il comparait avec sa femme (qu’il autorise) le 24 janvier 1785 chez maître Maupilier, notaire, pour rédiger un acte.
  • Quand Charles, un autre fils se marie en 1812, il déclare que son père est mort en l’an mil sept cent quatre-vingt-quatorze à Boismé suite aux « malheureux fléaux de la guerre de Vendée » prouvé et attesté par des témoins et par Marie-Anne Gabilly la veuve. Je veux bien là encore même si c’est plutôt triste mais j’ai un gros doute…
  • En effet, quand Mathurin un autre fils (et mon ancêtre) se marie avec Marie-Jeanne Bisleau en 1789, il est écrit que son père Louis est déjà décédé, ce que confirme le contrat de mariage du 29 décembre 1788.

Louis Grellier est donc mort à une date comprise entre le 24 janvier 1785 et le 29 décembre 1788 et sa veuve, ses enfants et des témoins ont menti au moins en 1812.

Je reviens à Marie-Jeanne Bisleau, ma sosa 67, l’épouse de Mathurin et la bru de Louis Grellier. Pour elle aussi, la date de décès n’est pas toujours exacte. Au mariage de son fils Pierre Grellier en 1822, une date de décès précise est donnée : le 25 décembre 1795. Cela est confirmé par l’acte de mariage de 1822 également de sa fille Marie-Jeanne Grellier. Pourtant Marie-Jeanne Bisleau est mère après 1795 de Pierre le 14 avril 1797 et de Louis-Mathurin le 26 août 1800. Elle décède en fait le 8 octobre 1800 à Moncoutant comme le prouve son acte de décès que j’ai fini par découvrir enfin dans un registre de Pugny.

Ce qui m’interroge ici et là, ce n’est pas tant les erreurs que les mensonges. Je veux bien admettre que mes ancêtres se trompent, que la mémoire est faillible. Des erreurs ou approximations sont tout à fait normales et naturelles. Mais pourquoi donner des dates précises ou suggérer des circonstances qui se révèlent être fausses ? Ce ne sont pas des exemples isolés. Je retrouve des faits similaires chez des collatéraux. Ces inexactitudes surviennent le plus souvent à la période post-révolutionnaire quand la disparition de certains registres paroissiaux et une tenue des actes d’état civil encore perfectible permettaient de fausses déclarations. Peut-être pour certains y avait-il aussi un intérêt quelconque à se prévaloir victime indirecte des guerres de Vendée après 1814. Avec la Restauration de la royauté, des indemnisations étaient offertes aux anciens combattants vendéens et à certaines victimes. Mais cela n’explique pas tout. Quel serait le but d’un mensonge en 1812 sous l’Empire ? Pourquoi donner une date précise mais fausse de 1784 ? Allez savoir pourquoi ?

Je n’ai pas la réponse à toutes mes interrogations sur tous ces actes du XIXe siècle qui m’intriguent. La rédaction de l’état civil est pourtant alors à peu près normalisée mais je dois vérifier bien souvent la véracité des déclarations. Je le fais encore davantage pour les registres paroissiaux antérieurs à la Révolution. Plutôt que de m’en plaindre, j’ai fait le choix de m’en consoler : s’il y a des erreurs qui subsistent dans mon arbre généalogique, elles ne sont sans doute pas toutes de mon fait.

N.B. Je ne garantis pas la qualité musicale de toutes les chansons qui m’ont servi à illustrer cet article. Vous pouvez vous en faire une idée en cliquant dessus !

14 commentaires sur “Erreurs et mensonges dans l’état civil

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  1. Article très intéressant. Je n’ai pas d’exemple aussi flagrant d’erreur en tête dans ma généalogie pour cette période. Il y a sans doute quelques inexactitude mais rien d’aussi important. Peut être parce que mes ancêtres ne viennent pas de régions très affectées par la révolution et qu’il était plus difficile de « mentir ». Par contre j’ai beaucoup d’actes dont il manque des informations, mais au moins on ne part pas sur une fausse piste ^^

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  2. J’ai le souvenir d’une branche sur laquelle je suis restée longtemps bloquée, à cause d’un mauvais nom de la mère dans un acte de décès en 1823. Plus près de nous, j’ai récupéré le dossier de naturalisation de mes beaux parents. Il leur fallait mettre les dates et lieux de naissance de leurs parents et frères et soeurs, et c’est un peu approximatif. Pour les frères et soeurs, les années ont bien été calculées, mais les jours et mois ont été rajoutés avec un autre stylo, et sont inventés !

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  3. Bonjour, Raymond,

    Avec toujours une petite pointe d’humour.
    Oui j’ai parfois relevé des erreurs de transcription ( ex. BICCARD au lieu de BINARD, PENILLARD au lieu de PEUILLARD, LAVELLE au non de LECAVELLE etc…) mais, parfois un père ajouté sur un acte de décès de sa fille, alors que sur son acte de naissance et de mariage, elle était déclarée de père inconnu; je n’ai pas trouvé d’acte de reconnaissance, et sa mère est déclarée célibataire lors de son décès. Lors d’un décès, une femme est déclarée divorcée en 1 ères noces et puis veuve de son second mari ( ce qui est exact, corroboré par l’acte de décès de cet époux), mais sur l’acte de mariage, il n ‘est pas noté que MME était divorcée.. Je n’ai jamais trouvé trace de ce soit-disant 1 er mariage.

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  4. Aujourd’hui même, je vois un acte de naissance contenant la mention marginale d’un acte de mariage à Fontenay le Comte, et je ne trouve pas cet acte. En fait le mariage était à la Chaize le Vicomte. Erreur de titre !

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  5. Merci pour cet article. Je partage tout à fait votre analyse. Les erreurs (approximations) volontaires ou non sont légion dans les actes d’Etat-Civil que je consulte concernant la Polynésie. La vigilance et les recoupements sont importants pour y voir clair.

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  6. « Erreurs et mensonges dans l’état civil » , ce beau texte donne de nombreuses situations, et réveille mes interrogations, âge des décédés, les parents différents dans les actes de mariage et décès, ou la fille naturelle, reconnue tardivement dont le nom variera jusqu’à son décès. Mais n’est-ce pas ce qui donne du sel à nos recherches ?

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  7. Bonjour;
    Qui donne du sel, peut-être Mauricette, mais qui complique pas mal les recherches, avec, aussi, malheureusement des risques de confusion avec des homonymes. On se transforme en Miss Marple de la généalogie pour démêler le vrai du faux.

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  8. Raymond,je suis une fan de généalogie et de votre blog.
    Donc, merci pour cet article très interessant, d’autant plus que je suis aussi une descendante de Louis Grellier et Marie-Anne Gabilly.
    mon arbre comporte d’ailleurs un point d’interrogation pour la date de déces de ce dernier :1784 ou 1794?
    En ce qui concerne Marie-Jeanne Bisleau, j’avais bien noté 1820 en date de déces.
    Merci pour ces précisions qui me sont bien utiles.

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    1. Bonjour Myriam. je suis ravi de me découvrir une nouvelle cousine et de lui être utile par cet article. J’espère un jour pouvoir éclaircir cette branche de mon arbre bien secrète avant la Révolution à cause de la disparition des registres paroissiaux de Boismé.

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  9. Instructif mais vérifié. Entre LAMBERT en Belgique qui devient LAMPERT au Luxembourg (mais je n’y crois pas encore) ou qu’on écrit aussi LEMBERT en France, c’est encore un joyeux foutoir.

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