À quoi reconnait-on une famille heureuse ? Sans doute à des détails, des petits riens, des présences. Ce sont ces indices minuscules qui me font penser que Louis Douit et Suzanne Veillet ont su construire une famille heureuse.
Louis est laboureur, fils de laboureur. Il est né en1671 à Saint-Pompain, à quelques kilomètres au nord-ouest de Niort. Son père, Jean Douit ou Audouit comme noté sur son mariage, semble avoir toujours vécu dans ce village. Suzanne, elle aussi fille de laboureur, a vu le jour quelques années plus tard, en 1678 à Nieul-sur-l’Autise une paroisse voisine, en Vendée. Les parents de Suzanne sont mes ancêtres Charles Veillet et Perrine Tapin, elle est la 4e des 11 enfants du couple. Louis et Suzanne ont 29 et 21 ans quand ils s’unissent le 3 février 1700 dans l’église abbatiale de Nieul-sur-l’Autise. Cette belle église est celle de l’abbaye Saint-Vincent fondée au XIe siècle où repose la mère d’Aliénor d’Aquitaine.

Après leur mariage, le couple s’installe à Saint-Pompain, chez le marié. Louis, à la différence de sa femme, a un peu d‘instruction puisqu’il signe d’un paraphe assuré, c’est un laboureur installé dans sa communauté villageoise. Moins d’un an après, le 6 janvier 1701, naît Augustin leur premier fils. Au moins 11 autres enfants voient le jour dans les années qui suivent, en tout 6 garçons et 6 filles. Le cadet, Jacques, vient au monde en septembre 1722. Vers 1706-1707, le couple et les 5 aînés quittent Saint-Pompain pour Villiers-en-plaine, à quelques encablures de là, plus près de Niort.
En suivant leur parcours, je me rends compte que la vie les a aussi plus épargnés que beaucoup d’autres familles de cette époque. Sur ces 12 enfants connus, et il est tout à fait possible que certains aient échappé à mes recherches ou que Suzanne ait fait des fausses-couches, une seule meurt en bas âge. C’est Marie, leur 3e enfant et la première des filles. Marie a 8 ans quand elle décède, sur le registre paroissial, sont présents ses 2 parents mais aussi ses 2 frères aînés, Augustin et Jean, âgés de 12 ou 11 ans. La mention de jeunes enfants n’est pas si fréquente dans les registres paroissiaux pour être remarquée.
Cette présence de toute la parentèle se retrouve sur les actes des mariages et les contrats de mariages des enfants, même si pour les contrats il est important de réunir toutes les parties de la communauté. Elle conforte cette idée d’une famille dont les membres restent proches et se retrouvent pour les grands événements de la vie.
Jean et Suzanne vivent longtemps, ils ont le temps de voir grandir leurs enfants et d’assister à de nombreuses unions. Suzanne s’éteint la première, le 20 septembre 1741, elle a 63 ans. Plusieurs de ses fils sont présents, tous ne sont pas cités mais les signatures attestent de leur présence. Les filles ne sont pas mentionnées mais le prêtre de cette paroisse, comme beaucoup, fait l’impasse sur les femmes !
Le 17 février 1744, Jacques le benjamin des enfants, épouse Elisabeth Caillon et passe contrat chez maître Nicolas Micheau. Le même jour, leur union religieuse est célébrée dans l’église de Villiers-en-Plaine. à cette accasion, toute la fratrie est réunie. Sur le contrat, les filles sont mentionnées ainsi que les beaux-frères et belles -sœurs du marié, mais aussi nombre de cousins germains.
Hélas ! la famille n’a pas le temps de se réjouir. La maladie doit déjà être entrée dans la maison, et une dizaine de jours plus tard, Louis Douit le père de famille s’éteint, il avait 73 ans. Marie, une des filles le suit dans la tombe quelques jours après, elle avait 24 ans. Le départ de Louis est dans l’ordre des choses, celui de Marie l’est moins. Aux 2 sépultures, les enfants sont là, ils s’épaulent et se soutiennent dans la peine, comme dans la joie quelques jours avant.
Louis qui a quelque instruction a souhaité que ses fils apprennent à lire et à écrire. Je croise régulièrement les paraphes des aînés et des plus jeunes. Seuls, Charles et Louis nés peu de temps après le déménagement à Villiers-en-Plaine, ne signent pas. Il est possible que le départ pour un nouveau village ait signifié des années plus difficiles et que l’enseignement n’ait pas été une priorité à ce moment-là. Cependant, la situation de la famille a dû s’améliorer puisque les 2 plus jeunes connaissent leurs lettres. Rien pour les filles par contre, aucune n’a laissé son empreinte sur un acte ! Mais les années passant, Charles finira lui aussi par apprendre à signer (et à écrire ?), puisqu’à partir de 1761, alors qu’il a 47 ans, je trouve sa signature sur des actes.
Charles Douit et Suzanne Veillet ont eu 12 enfants et au moins 45 petits-enfants. Une belle descendance que tous deux ont eu la chance de connaître et de voir grandir. Comme beaucoup de familles à cette époque, les enfants ne s’éloignent pas trop. 4 des garçons demeurent dans la paroisse de Villiers. Augustin, l’aîné accueillera 11 enfants, presque autant que ses parents ! Louis et son épouse vivront d’abord à Ardin avant de revenir à Villiers-en-Plaine, 8 bébés naîtront dans les 2 paroisses. François restera aussi à Villiers, il aura 10 enfants de ses 3 épouses. Charles ne se mariera pas, mais reste toute sa vie dans son village natal, il est très proche de ses frères et sœurs. Toujours présent sur les actes, il accompagne aussi ses neveux et nièces.
Les autres enfants ne s’éloignent guère de Villiers-en-Plaine. Après son mariage, Marguerite et son époux s’installent à Saint-Pompain, 5 enfants y voient le jour. Louise rejoint son mari à Saint-Maxire, ils auront 7 enfants. Suzanne s’installe dans cette même paroisse où elle met au monde 2 filles. Jacques, le benjamin, part à Xaintray où sa femme donne le jour à 2 nourrissons. Jean s’éloigne un peu lui aussi, il se marie et vit à Niort mais n’a pas de descendance. Je suis à peu près certaine que la majorité d’entre eux a continué à entretenir des liens forts, ils ont su préserver ce qui leur avait été transmis par leurs parents.
Je prends peut-être mes désirs pour la réalité, mais je pense que la famille de Louis Douit et Suzanne Veillet a été unie et plutôt heureuse. La vie de nos ancêtres nous offre bien souvent des drames et des difficultés, alors quand on croise des gens heureux, il est plaisant de passer un peu de temps en leur compagnie.
Bonjour,
Oui, des grandes familles, mais comme disait la reine Marie-Thérèse, épouse de Louis XIV: » Toujours coucher, toujours grosse, toujours accoucher »!!!
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Ah oui ! Vu ainsi, ca ne fait pas vraiment rêver 😉
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Avoir une grande famille est devenu un rêve pour beaucoup de monde de nos jours… Je n’ai que deux enfants, et je dois dire qu’avec le recul j’aurais aimé en avoir plus. Mais la société de consommation dans laquelle nous vivons s’y prête mal.
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Même si cela fait rêver, c’est sans doute un peu difficile à gérer.
Pour notre part, nous nous sommes aussi arrêtés à deux !
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Penser que nos ancêtres ont été heureux, c’est souvent une intuition qui s’appuie sur des indices tangibles. On s’inquiète pour eux et on a besoin d’être rassuré.
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C’est rassurant de penser que certains ont eu une vie plus douce. Cette famille a été épargnée par des drames (en apparence du moins), et c’est quand même assez rare.
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