Quand je suis née à Saint-Laurs dans les Deux-Sèvres, nous étions la seule famille Morisset de la commune.
Mon père et mon grand-père étaient les derniers à porter ce patronyme dans le village.
Pourtant, ce nom était localement très répandu. Ainsi, entre 1780 et 1947, Saint-Laurs a connu pas moins de 6 maires et 1 syndic qui s’appelaient ainsi.

Mon arrière-grand-père paternel et son épouse portaient tous les deux ce nom. Tous les deux étaient nés à Saint-Laurs.
Je me souviens que dans mon enfance on m’a toujours dit qu’ils n’avaient pas de lien de parenté. A ce jour, je n’ai effectivement pas trouvé à raccorder ces deux branches. Il est vrai que sur la branche paternelle, je bloque à la 8e génération et ne peut aujourd’hui faire que des hypothèses sur ma ligne agnatique.
Comment en arrive-t-on à la disparition presque complète d’un nom dans un village qui en a compté un grand nombre ?
Avec en utilisant les actes de baptême et d’état civil, j’ai relevé les naissances d’enfants Morisset à Saint-Laurs.
En regardant simplement le nombre de garçons nés entre 1640, date des premiers registres, et 1910 on peut tenter d’analyser cette baisse.Même si le diagramme ci-dessus ne permet pas de comprendre entièrement la disparition des familles portant ce nom, on y trouve quelques informations :
– une tendance à la baisse régulière sur l’ensemble de la période
– les conflits, guerres napoléoniennes et guerre 14-18, responsables du décès de jeunes hommes
– des périodes sans naissances de garçons et donc sans transmission du nom
– mais surtout une diminution accrue à partir des années 1800, correspondant à une période ou les déplacements deviennent plus faciles, et par conséquent permettent le départ de jeunes vers d’autres villages ou villes.
On peut retrouver ces causes (et d’autres) en se penchant sur les proches du couple Auguste Morisset et Fleurentine Morisset. En voici quelques unes :
– les accidents, comme celui d’Auguste Morisset, le seul frère vivant de Fleurentine mort à 17 ans au fond de la mine
– les départs, comme pour Victor Morisset, le frère d’Auguste, parti d’abord à quelques kilomètres, à Coulonges-sur-l’Autize, puis à Pons en Charente-Maritime
– les enfants qui ne se marient pas, comme Jacques Morisset, l’oncle d’Auguste, qui entre au séminaire
– les couples qui ont peu d’enfants, comme Auguste et Fleurentine qui n’auront qu’un fils et une fille
– la mortalité infantile, qui frappa leur première petite-fille, la sœur aînée de mon père, morte à la naissance.
Tout cela fait qu’un jour un patronyme disparait d’un lieu et qu’aujourd’hui mon père est le seul Morisset à vivre à Saint-Laurs.
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