… Le 7 février, les délégués grévistes adressent au juge de paix de Coulonges-sur-l’Autize la liste de leurs revendications parmi lesquelles aucun licenciement et des augmentations de salaire : 4,25 francs pour les mineurs, 3,50 pour les manœuvres, 2,25 pour ceux qui travaillent à la surface et 1,75 pour les manœuvres de moins de 18 ans. Ces demandes sont repoussées en bloc par la direction le 9 février.
Très vite, le journal Le Mémorial des Deux-Sèvres rend compte des événements. Il relate les faits et se félicite de l’attitude posée des grévistes. Quelques jours après, devant un conflit qui risque de s’enliser, la direction accepte la médiation du député Disleau. Les mineurs offrent alors de ne travailler que 4 jours 1/2 au lieu de 5 pour éviter les renvois mais la société rejette leur proposition.

Pour permettre aux familles des grévistes de vivre, on fait appel à la solidarité des autres syndicats, une souscription est ouverte dans le Bulletin de la Fédération nationale des syndicats et groupes corporatifs ouvriers de France.
Devant les licenciements devenus effectifs, plusieurs manifestations féminines s’organisent, drapeaux en tête, marchant vers les puits et les demeures des ingénieurs rendus seuls responsables. La presse nationale se fait l’écho des manifestations, notamment La Justice, le quotidien fondé par Georges Clemenceau.
Finalement, le 11 mars, le direction offre de régler les salaires en fonction du prix de vente des charbons. Cette proposition d’échelle mobile est acceptée par les ouvriers et donne lieu à une convention, signée le 14 mars, qui met fin à la grève. Cette convention maintient le salaire en vigueur avant la grève et octroie une augmentation au fur et à mesure que les cours du charbon augmenteront, la moitié de cette augmentation suivant une échelle mobile dont le minimum sera le cours actuel. Elle est signée par M. de Borde représentant l’administration des Houillères et les délégués syndicaux Louis Rétière, Auguste Suire, Célestin Lardy, Bellanger et François Boisselier (je retrouve 3 d’entre eux dans mon arbre généalogique.)
Plus d’un mois de grève pour un marché de dupe !
Si l’on donne l’assurance qu’il n’y aura pas de nouveau renvoi, avec quelques réserves cependant, les ouvriers licenciés ne sont pas repris. Quant à la mise en place de l’échelle mobile, c’est un première en France, elle va s’avérer difficile, voire impossible, à mettre en place. Avec un gisement peu productif et la concurrence des charbons anglais, les ouvriers ne seront pas gagnants.
Cette première grève va être suivie de plusieurs autres, une dès 1898, avec des résultats divers.
Sources :
- Archives départementales des Deux-Sèvres, série M : 1M401 et 10M17
- Site de l’Inventaire Poitou-Charentes. Dossier documentaire d’usine. Mine de charbon du marquis de Nettancourt : http://dossiers.inventaire.poitou-charentes.fr/le-patrimoine-industriel/notice.php?id=IA79002440
- Le bassin houiller de Saint-Laurs de sa découverte à son abandon 1838-1958. Monographie du Club d’histoire-géographie du collège de Coulonges-sur-l’Autize animé par Michel Monteux. 1980-1981
- La première grève des mineurs de Saint-Laurs (1896). Florence Regouard. In : Bulletin de la Société Historique et Scientifique des Deux-Sèvres. Pages 58-60
- La grève des mineurs de Saint-Laurs : 4 février-14 mars . In : Statistiques des grèves et des recours à la conciliation et à l’arbitrage survenus pendant l’année 1896. Pages 193-195
- Michel Montoux. Coulonges-sur-l’Autize et son canton. Patrimoines & médias, 2008
- Le mémorial des Deux-Sèvres, fevrier-mars 1896
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