Quand Nicolas Charrier et Françoise Riposseau se sont mariés le 11 février 1722 à Saint-Clémentin, comment auraient-ils pu se douter que cette union serait annulée quelques années plus tard ?
Pourtant, ce jour-là, après la publication des trois bans, nul ne s’y était opposé. Il n’y avait certes plus beaucoup d’anciens encore vivants qui auraient pu s’interroger sur la conformité du mariage au droit canon. Du côté du marié, il ne restait que son père qui décédera l’année suivante. La mariée qui avait perdu ses deux parents ne pouvait compter que sur un oncle.
2 ans plus tard, il faut tout recommencer : « Nicolas Charrier et Françoise Riposseau de la paroisse de Saint-Clémentin sont mariés depuis environ quatre ans (sic) sans savoir qu’ils fussent parents du 3e au 4e degré, ce qu’ayant découvert, ils nous supplient de leur en accorder la dispense. »
Les degrés en droit canon indiquent les liens qui unissent une famille : des frères et sœurs sont liés au 1er degré, des cousins germains sont liés au 2e degré, des cousins issus de germain sont liés au 3e degré. Le 4e degré est le lien unissant les descendants de 2 arrière-grands-parents qui seraient frères et (ou) sœurs. L’Église tolère les mariages à partir du 4e degré. En deçà, il faut obtenir une dispense qui sera accordée par l’évêque dans la plupart des cas.
Dans le cas qui concerne mes ancêtres, une dispense du 3e au 4e degré, cela veut dire qu’un des grands-parents du marié ou de la mariée est le frère (ou la sœur) d’un des arrière-grands-parents du marié ou de la mariée. Si je ne me trompe pas, il y a 64 possibilités de fratrie à envisager. Courage !
Qui a pu découvrir moins de 2 ans plus tard que ce mariage était interdit selon les canons de l’église ? Qui avait la mémoire de l’histoire de ces 2 familles ? Était-ce un curé méticuleux épluchant comme moi les registres, non pour trouver des ancêtres mais pour obtenir des dispenses rapportant quelques deniers à l’Église ? À supposer qu’une personne ait connu les 4 parents et les 8 grands-parents des 2 mariés, leur noms de famille, tous différents, n’éveillaient pas le plus petit soupçon de consanguinité.
Quelqu’un a quand même fini par trouver qu’ils descendaient d’un même couple d’ancêtres lointains. De mon côté, j’ai très longtemps échoué à le prouver et je viens juste de le faire, un peu par hasard.
J’avais pourtant la réponse depuis longtemps dans mon arbre. Il suffisait juste que je m’y replonge et que j’y croie. Je remonte plutôt bien sur cette branche de meuniers et de boulangers. Ils vivaient à la limite des départements actuels des Deux-Sèvres et du Maine-et-Loire. J’ai les noms et prénoms de tous les parents et grands-parents des jeunes mariés. Je ne connais que 8 arrière-grands-parents sur les 16 mais, par chance, j’ai la « bonne » arrière-grand-mère du marié, elle s’appelle Malaine Gauducheau. C’est elle qui est la sœur d’une des grands-mères de la mariée, Perrine Gauducheau. Et je connais même le nom de leurs parents, Pierre Gauducheau et Jacquette Mussault. Je pourrais désormais moi aussi m’opposer au mariage de Nicolas et Françoise !
Le 25 septembre 1724, dans la chapelle des Rosiers de Saint-Clémentin, le mariage de Nicolas Charrier et de Françoise Riposseau est réhabilité, grâce à la dispense de l’évêque de La Rochelle en date du 22 septembre, sans avoir besoin de recourir aux bans et avec la seule présence des témoins nécessaires.
Pierre Gauducheau et Jacquette Mussault, ancêtres communs à Nicolas Charrier et Françoise Riposseau, ne sont bien sûr pas les uniques implexes* de ma généalogie. Et les jeunes mariés ne sont sûrement pas les seuls à avoir dû demander un acte de dispense pour consanguinité. Ils sont par contre les seuls dont l’acte soit à la fois parvenu à moi et résolu par moi.
Quant à mes mariés réhabilités, leur histoire familiale est plutôt triste. Ils ont eu 6 enfants, dont 2 nés avant la réhabilitation. Tous sont décédés dans la petite enfance sauf la benjamine, mon ancêtre Jeanne Charrier. Nicolas Charrier décède aux Aubiers en 1731 à l’âge de 33 ans. Son épouse Françoise ne se remarie pas et décède en 1763 aux Aubiers âgée de 64 ans.
implexe* : dans un arbre généalogique, c’est un même ancêtre qui apparait dans plusieurs branches de l’arbre.
Pour finir cet article et bien débuter l’année,
Sylvie et moi vous souhaitons le meilleur pour 2023
dans tous les domaines :
épanouissement personnel et professionnel, santé, fortune… et bien sûr généalogie.
Bonjour,
Excellente année 2023 également à vous.
Quel stress pour ce couple de voir leur mariage annulé!! Je me demande si les autorités écclésiastiques se mettaient à leur place. Non, sans doute puisque les prêtres catholiques sont célibataires contrairement aux pasteurs protestants et aux rabbins ( et prêtres d’autres religions, si je ne m’abuse).
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L’intérêt de contester ce mariage est aussi de faire payer pour obtenir la dispense.
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Tout est bien qui fini bien. Meilleurs voeux généalogiques pour cette nouvelle année !
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Merci Élodie
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