
En 1872, Jeanne, Victoire, Marie et Françoise Renoux, les filles de mes ancêtres Jean Renoux et Marie-Jeanne Pizou, ont toutes les quatre épousé des garçons du village, qui travaillent au fond de la mine. Elles vivent pour trois d’entre elles au bourg de Saint-Laurs, alors que la dernière est installée avec son mari au puits Sainte-Claire. Elles ont gardé de nombreux liens d’autant que trois habitent dans des maisons voisines. J’ai imaginé ici quel travail précis pouvait faire leur mari.
Jeanne, l’aînée naît en 1833 à Faurs sur la commune voisine de Saint-Maixent-de-Beugné. Elle se marie en 1860 à Saint-Laurs avec Jacques Lardy dont la famille demeure à Saint-Laurs. Au moment de leur union, tous 2 sont domestiques, elle à Saint-Laurs et lui à Villiers-en-Plaine (à 15 kilomètres de là). Après les noces, le couple s’installe au village de la Bruyère où naît leur fille aînée. Jacques est devenu mineur et Jeanne est journalière. En 1863, à la naissance de leur seconde fille, ils sont toujours à la Bruyère, Jacques est alors journalier. Enfin, en 1871, quand leur plus jeune fille voit le jour, ils sont installés au bourg, Jacques est à nouveau mineur. En 1872, leurs 3 filles vivent avec eux. Dans les années qui suivent Jacques est le plus souvent mineur, mais à sa mort à l’âge de 66 ans, il est déclaré cultivateur. Quant à Jeanne, elle vivra bien plus longtemps puisqu’elle s’éteint à l’âge de 92 ans, en 1926, au Prieuré de Saint-Laurs.
Même si le recensement se contente de noter « mineur », il existe un grand nombre de métiers au fond de la mine, là où travaillent les époux des filles Renoux. Jacques Lardy est peut-être piqueur. Si c’est le cas, il abat le charbon et boise la taille à mesure qu’il avance. Il discute des conditions techniques d’exploitation du chantier avec le maître-mineur, après avoir évalué la quantité de charbon qui pourra être abattue. Il peut diriger un aide-piqueur, souvent un jeune garçon. Pour l’abattage, il creuse, avec son pic (appelé grôle en raison de sa forme en bec d’oiseau) au bas de la paroi, puis plante des coins de bois ou de métal un peu plus haut, pour provoquer la chute d’un bloc de charbon.
La seconde des filles Renoux, Victoire, voit le jour en 1839 à la Morisseterie de Saint-Laurs. Elle épouse en 1864 Pierre Texier, un mineur de la commune voisine du Busseau. Lui a 28 ans, elle a 24 ans et est couturière. En 1872, ils sont parents de 3 filles et vivent dans le bourg, Pierre est toujours mineur. Dans les années qui suivent 2 garçons viennent agrandir la famille, alors que la plus jeune des filles s’éteint à l’âge de 4 ans. Pierre Texier exercera ce métier toute sa vie, une vie assez longue pour un mineur puisqu’il s’éteint à l’âge de 78 ans, en 1915. Il était veuf, Victoire était décédée quelques années avant en 1904.
Pierre Texier est peut-être boiseur. Il élève ou élargit les galeries selon les besoins de l’exploitation, et installe et entretient le « boisage » (soutènement). Il consolide et remplace les bois lorsque la sécurité l’exige. Il travaille à la hache et à l’escofine (sorte de scie égoïne). Un métier difficile et important qui nécessite de la force, de l’expérience, de l’habileté et une grande vigilance. Le développement du roulage du charbon avec des chevaux (après 1889) va nécessiter l’élargissement et la consolidation des galeries, cela va amener cette profession à se distinguer de plus en plus de celle de piqueur au fil des années. Lui aussi est souvent aidé par un jeune garçon.

La troisième, Marie, vient au monde en 1842 à Saint-Laurs. En janvier 1866 elle se marie dans son village avec Jean-Jacques Bonnaud, un mineur qu’elle connait sans doute depuis l’enfance, il a 30 ans et elle 23. Très vite, naissent 2 filles puis un garçon, lequel meurt à 1 an. En 1872, ils vivent avec leurs 2 filles. Depuis leur mariage, Jean-Jacques est mineur et Marie est journalière. Un autre garçon viendra agrandir la famille l’année suivante. Quelques années plus tard, en 1880 Jean-Jacques devient chef-mineur et s’installe au puits Sainte-Claire, puis au puits Saint-Laurent c’est là où il décède à 54 ans. Marie ne se remarie pas, elle meurt en 1915, à l’âge de 73 ans.
Jean-Jacques Bonnaud deviendra maître mineur : dans le nord, on l’appelle aussi le porion, un terme qu’on ne trouve pas à Saint-Laurs. Il travaille essentiellement au fond et peut diriger une équipe, voire organiser et superviser les travaux et les équipes d’un secteur. Au quotidien, c’est lui le chef direct des mineurs de fond. Les maitres-mineurs doivent faire respecter une certaine discipline. Ils peuvent, pour cela, infliger des amendes ou d’autres sanctions. Ils sont souvent choisis parmi les ouvriers expérimentés.
La plus jeune, Françoise, née en 1848 se marie en 1868, avec Auguste Bonnet, lui aussi mineur du village. Début 1872, ils vivent dans le bourg de Saint-Laurs avec Céline, leur fille de 4 ans. Françoise est enceinte et va accoucher d’une autre fille en avril 1872. 2 autres enfants viendront agrandir la famille en 1874 et 1887. Auguste sera mineur toute sa vie mais il meurt assez jeune, à 46 ans, en 1892. Françoise vit longtemps, elle s’éteint en 1932, à l’âge de 84 ans, au village de Faurs, sur la commune voisine de Saint-Maixent-de-Beugné.
Auguste Bonnet a pu occuper le poste de manœuvre, ils semblent avoir été nombreux à Saint-Laurs. Cet emploi peu qualifié recouvre divers travaux, le manœuvre peut être approvisionneur, aide-géomètre, nettoyeur, manutentionnaire, accompagnateur… Il pouvait aussi disposer les bennes pleines dans la cage de remontée et être responsable des manœuvres d’encagement. À moins qu’il n’ait eu en charge le soins aux chevaux gardés au fond de la mine.

Encore bravo
J’ignorais tout de cette aventure humaine dans les Deux Sevres avant d’être vous lire
TB
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Bonjour,
J’ignorais également qu’il y avait des mines dans les DEUX SEVRES Par contre, grâce à un voisin et à un livre de MICHEL BUSSI ( » Maman a tort, » je crois), j’ai appris qu’il y en avait en NORMANDIE ( dans le CALVADOS, des mines de fer).
Donc pas uniquement dans le NORD PAS DE CALAIS et la LORRAINE.
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Merci pour vos commentaires. Les mines ne sont pas uniquement l’apanage du Nord et de l’Est de la France. Nous verrons bientôt qu’on en trouvait en Bretagne, en Ardèche, dans les Pays de Loire…
Mais avant de nous lancer dans ce challenge, nous ne connaissions pas tous ces lieux.
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Bonne Fête SYLVIE (se souhaite la Veille ??)
Merci …les Feuilles de mon arbre frémissent et les Branches s’agitent grâce à tous ces détails..Super l !! je vous quitte …le café est chaud aux corons à la Verrerie de Faymoreau.. et chez les Monnereau (Sabotiers voisins du sabotier AUBINEAU Jean )à la Farferie de Marillet A La douche…
Bon Week end…mais on ne connaissait pas ça en ce temps là !!!
Gilles et Dany (perceval79)
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Merci Gilles 🙂
J’espère que la suite du challenge vous plaira aussi.
Bonne journée à vous deux.
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Il y a une petite coquille dans le paragraphe de Victoire et Pierre : 1972 qui doit être. Je suppose, 1872 😊
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Merci, c’est corrigé 😎
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