Cet article est la suite de « La métairie des Touches avant la Révolution ».
Quand arrive la Révolution en France, la ferme des Touches à Terves n’est plus occupée par mes ancêtres. Elle appartient au prieuré voisin de la Motte-Beaumont et elle est exploitée par une famille de bordiers, les GABILLY. Comme la région n’adhère pas vraiment à l’idéal républicain, les premiers troubles y apparaissent très vite. Le 24 août 1792, au moulin de Cornet à moins de 3 km de la métairie, une troupe de 2 000 paysans se fait massacrer en voulant assiéger Bressuire. On relève entre 200 et 600 morts. Ce sont les prémices des guerres de Vendée de 1793 à 1795, avec ses grandes batailles pour la conquête des villes républicaines, avec ses épisodes de guérilla dans les chemins creux de campagne et avec la répression aveugle qui s’ensuit.
La commune de Terves, fortement royaliste, est très impactée. À l’automne 1793, peu avant que l’armée vendéenne livre un combat inutile de l’autre côté de Loire durant la « virée de Galerne », le général républicain Desmares basé à Bressuire mène une politique de destruction, annonciatrice des colonnes infernales. Les troupes du général pillent les communes autour de Bressuire. Un jour d’octobre, un détachement de l’armée traverse donc la paroisse de Terves et brûle tout sur son passage : le bourg et l’église, les moulins, les métairies, les hameaux, peu de bâtiments échappent à son passage.

Pas la ferme des Touches en tout cas : la maison, la grange, l’écurie et le toit à bestiaux sont incendiés ce jour-là. Y a-t-il eu des victimes ? Sur la paroisse, certainement. À la ferme des Touches, peut-être. Il est difficile de le savoir puisque les registres paroissiaux et d’état civil de cette période ont disparu. Si la famille GABILLY travaillait encore aux Touches ce jour-là, elle a survécu car je la retrouve indemne en 1796 sur une autre exploitation à Boismé.

Avec le retour progressif et fragile de la paix, la métairie est à nouveau exploitée. Les bâtiments sont en grande partie détruits mais les terres demeurent et elles sont plutôt vastes. C’est maintenant le cultivateur François GROLLEAU qui est à l’ouvrage. Il est veuf, aidé de son fils, de ses filles et aussi de domestiques pour faire le travail. Le propriétaire a également changé. Les Touches n’appartiennent plus au prieur de La Roche-Beaumont, les biens des nobles et du clergé ayant été confisqués. De nombreuses terres ont été revendues à des particuliers et c’est l’occasion pour certains de se constituer de belles fortunes personnelles, comme la famille PUICHAUD, des notables de Moncoutant. Ils sont républicains et ils profitent de cette période pour acheter de nombreuses fermes dans la région. Ainsi, quand l’État vend la ferme des Touches, c’est Pierre PUICHAUD-DUVIVIER qui l’acquiert, le 12 mars 1791. Avant son décès vers 1796, son fils Noël PUICHAUD-BAZIERE en devient propriétaire. Il la revend peu après, le 23 octobre 1801, à son frère Pierre-Louis PUICHAUD-GIRARD pour 6 600 francs. Seule une partie de la maison où loge la famille GROLLEAU est alors reconstruite. C’est vraiment une bonne affaire pour l’acheteur car, un an plus tard, la ferme est estimée 12 000 francs !
Le métayer François GROLLEAU emploie des « valets » pour l’assister à la tâche. Parmi ceux-ci, je retrouve un de mes ancêtres. En 1807, François BAUDU, mon sosa 238, veuf depuis quelques années, y décède en tant que domestique. En 1811, la métairie est presque totalement reconstruite. Il ne reste à finir que les « dedans de la maison » et quelques bâtiments pour lesquels Pierre Louis PUICHAUD-GIRARD sollicite l’aide financière de l’empereur, au titre de la reconstruction après les guerres de Vendée. Il faut que la ferme soit rentable. C’est devenu sans doute difficile pour François GROLLEAU. Pour faire « tourner » une ferme, il faut des enfants, une main-d’œuvre toute trouvée et gratuite, mais François GROLLEAU est seul désormais. Il ne s’est pas remarié, son fils est décédé, ses filles sont parties. Il vieillit, sa santé décline sans doute puisqu’il va mourir aveugle quelques années plus tard. Son bail n’est pas renouvelé et c’est une nouvelle famille qui va venir s’installer aux Touches entre 1811 et 1816. Est-ce le retour de mes aïeux sur les terres des Touches ? Vous le saurez très bientôt !
La suite : de la Restauration au Second Empire
Sources AD 79
– registres paroissiaux et d’état civil de Terves
– 1 M 607 (reconstructions après la Révolution)
– 1 Q 238 (ventes des biens après la Révolution)
– 3 P 3039 et 3 P 361 (cadastre)
– 3 E 10614 (acte de vente des Touches entre les frères Puichaud chez Me Beliard)
Merci à Jean-Philippe Poignant qui m’a bien aidé à comprendre cette période historique.
J’adore le teaser à la fin 🙂
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Le secret de tout bon feuilleton !
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