La guerre de 39-45 vécue par un enfant de Terves (1/5)

Mon parrain, Michel CHESSERON, a ​rédigé quelques-uns de ses souvenirs d’enfance à la ferme de la Roulière à Terves (Deux-Sèvres) pendant l’Occupation allemande. ​Ces écrits​ personnels​ ​ont aussi un caractère universel​. Ils racontent une page de notre Histoire vue par des yeux d’enfant. Je lui ai proposé de publier son texte particulièrement bien écrit et touchant sur mon blog en feuilletonnant. Il a accepté et je l’en remercie. Voici donc le premier épisode. 

Je suis né en 1934, l’année où Hitler est devenu chef de l’État allemand après avoir pris le pouvoir comme chancelier le 30 janvier 1933. En 1938 il annexe les Sudètes et l’Autriche et, par les accords de Munich, l’Angleterre et la France acceptent le fait accompli. En mars 1939, il viole ces accords en envahissant totalement la Tchécoslovaquie. Et le 3 septembre, suite à son agression de la Pologne par l’occupation du couloir de Dantzig, territoire qui donnait à la Pologne accès à la mer Baltique mais séparait la Prusse orientale de l’Allemagne, l’Angleterre et la France lui déclarent la guerre. Beaucoup d’hommes de Terves sont mobilisés. Papa ne l’est pas parce qu’il a plus de 40 ans et qu’il a la charge d’une grande famille. Louis LANDREAU, par contre, d’un an plus âgé, part quelques mois à la poudrerie du Ripeau pour fabriquer des munitions, parce qu’il n’a que deux enfants. Les soldats rejoignent la Ligne Maginot où le général Gamelin laisse l’armée française stagner sans attaquer l’armée allemande occupée en Pologne : c’est la « drôle de guerre ». Mais le 10 mai 1940, Hitler lance ses armées sur les Pays-Bas, la Belgique et la France. Les chars Allemands débordent la Ligne Maginot en passant par les Ardennes et commencent à déferler sur la Belgique et la France. Beaucoup de soldats meurent ou sont faits prisonniers puis emmenés en Allemagne ou réussissent à fuir. La Belgique capitule le 28 mai. Le 14 juin, les Allemands entrent dans Paris. Le 25, le maréchal Pétain qui a remplacé Paul Reynaud comme président du Conseil signe l’armistice.

Les Allemands occupent la région

En quelques jours, de huit à dix millions de Belges et de Français fuyant l’envahisseur ont déferlé sur les routes de France sous le feu des avions allemands qui les mitraillaient. Après avoir atteint Bressuire, une de ces colonnes de réfugiés a pris la route de la Vendée en passant par Clazay ; de la Roulière on les apercevait à travers les arbres passer devant l’Orbrie. Un de ces jours de Juin, quelques-uns arrivés au Petit-Puy ont bifurqué en direction de Terves, puis vers la Roulière. Parmi eux, de riches commerçants de Béthunes, monsieur et madame LEROY, avec leur fille et leur gendre, les DUQUESNE, et leur chauffeur prénommé Balthazar, un réfugié de la Guerre d’Espagne, qui avaient pour trois semaines de vivres dans leur camion. Âgé d’à peine six ans, je me souviens de ce camion qui m’apparaissait chargé de toutes sortes de choses, d’un matelas en particulier, sur lequel le jeune couple passait la nuit à la belle étoile car il faisait très beau. Tout ce monde est resté environ huit jours et mangeait dans le fournil. Jojo mangeait avec eux. Deux grandes filles ont dormi dans la chambre de mes sœurs, un couple de sœurs dans chaque lit. Marie se souvient qu’elles se sont occupées d’Hélène et d’elle-même, par exemple en leur faisant faire des dictées. Un jour, madame LEROY a dit à Maman qu’elle avait des enfants très gentils, mais ajoutait, en montrant Lili :
– Celui-là, il n’est pas comme les autres.

Très observateur et touche-à-tout, il avait remarqué que les pneus du camion avaient une valve comme ceux des vélos ; après en avoir enlevé le chapeau, il a appuyé dessus et le pneu s’est dégonflé ! Madame LEROY disait qu’elle avait plus peur des rats que des obus, mais quand les Allemands nous ont tiré dessus, elle s’est sauvée vers le Champ de la Mothe. Ils tiraient depuis Noirterre et visaient le clocher de Bressuire ; les vitraux de l’église ont été un peu endommagés. Des obus sont tombés tout près de chez nous, dans les champs du Puy-Blain, par exemple. L’un d’eux est tombé dans l’étang à sec du Petit-Puy. Un autre tombé sans exploser dans un champ de Bois-Richard, près de la Mothe, a été déterré plus tard par le fils ROY en passant la herse sur le guéret. Un autre a coupé un arbre à l’entrée du chemin du Soc. Selon Lili, qui a fait son service militaire dans l’artillerie au Maroc, ils étaient tirés par des canons de 77 autrichiens. Nous sommes allés nous réfugier dans la Cave aux bettes, où nous étions protégés des éclats, mais si un obus était tombé sur cette casemate toute la famille aurait été anéantie. Nous entendions leur sifflement. Papa nous a disputés, Lili et moi, parce que nous « boulitions » dehors, curieux de nous rendre compte de ce qu’il s’y passait. Quelques jours plus tard, nous sommes allés avec les voisins LANDREAU voir les trous d’obus.

Le jeune DUQUESNE, qui était encore habillé en militaire a déclaré à Maman qu’il désirait se démobiliser lui-même sur place. Il a troqué son uniforme contre des habits de Papa, et Maman l’a fait teindre quelque temps plus tard.

Nous n’avons pas gardé de relations avec ces réfugiés-là, mais avec une famille qui s’était arrêtée à l’Orbrie, chez les CAILLAUD. Il s’agit de la famille THOMAS, le couple et le grand fils, qui avaient fui Méru dans l’Oise. Ils avaient appris que nous avions un poste de radio et venaient régulièrement à travers champ pour avoir des informations. Ils sont revenus nous voir l’été 1946 et nous ont aidés à faire les moissons.

En effet, nous avions un « poste », comme on disait. Il était caché chez Grand-père et Grand-mère dans un petit potager hors d’usage derrière le rideau d’une fenêtre à barreaux verticaux. C’était un objet d’autant plus précieux qu’il était rare. Il avait été offert au début de la guerre par Tonton Jean à ses parents. La première fois qu’il l’a fait marcher devant nous, nous étions ébahis d’entendre des voix sortir de ce petit meuble. Quand quelqu’un a prononcé mon prénom, je me suis écrié :
– Michel, il a dit Michel !

Avoir un poste de radio chez soi pendant la guerre était d’abord un luxe mais aussi un luxe risqué. Car si les Allemands l’avaient su, ils auraient pu accuser Papa de soutenir la Résistance contre eux. Cependant il restera muet le temps de la longue coupure de l’électricité par les occupants.

Les Allemands sont arrivés à Bressuire les 22 et 23 juin. J’ai découvert sur Internet un très intéressant témoignage de notre cousine Madeleine FROUIN, qui raconte cette arrivée après la débâcle des soldats français, puis la chasse aux juifs pendant la Guerre : j’ignorais tout cela.

Soldats allemands à Bressuire dans le parc Alloneau (Source Histoire et patrimoine du Bressuirais)

[à suivre…]

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